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28 février 2014 5 28 /02 /février /2014 22:41

Un vent nouveau, que certains qualifient de frénésie, souffle sur l'enseignement supérieur mondial : les MOOC, Massive Open Online Courses ou « cours en ligne ouverts et massifs (CLOM) » ou « cours en ligne ouverts à tous (CLOT) ». Partis des Etats Unis, lancés par Stanford en 2011, rejoints par Harvard et MIT début 2012 qui fondent ensemble edX (1), les MOOC sont maintenant proposés partout dans le Monde. C'est en quelque sorte université 2.0.

 

L'Europe est à la traine et c'est seulement depuis quelques mois que les acteurs français sont rentrés dans le jeu. Les premiers à se lancer début 2013, dans l'univers francophone ont été Polytechnique de Lauzanne (EPFL), l'Université de Genève et l'X. Dans un mouvement bien français, le gouvernement mené par la Ministre de l'Enseignement Supérieur supporte le groupement FUN France Université Numérique qui rassemble Sciences Po, le CNAM et des universités parisiennes ou bordelaises qui a ouvert ses premiers cours en janvier 2014. La ministre a promis une subvention supplémentaire de 8 millions €

 

Des jeunes pousses se sont engouffrées pour profiter de cette opportunité en proposant des plate-formes pour les cours en ligne, des outils et offrant même de formater et de développer du contenu pour les universités et les professeurs qui leur confient leurs cours. A présent, il semble que les jeunes pousses américaines comme Coursera, Edura, udacity ont pris elles aussi une longueur d'avance. EdX a adopté un positionnement particulier en ayant développé sa plate-forme en logiciel libre accessible à tous, que FUN utilise.

 

Il est certain que de nombreuses institutions proposent des cours publics en ligne depuis longtemps, en France notamment le CNED, le CNAM, le Collège de France. Avec les MOOC, on change de dimension que cela soit en nombre d'inscrits ou en positionnement. En effet les MOOC se présentent explicitement comme des équivalents des cours universitaires proposant un programme complet, des exercices et une évaluation en ligne. Les auditeurs des cours, les étudiants eux-mêmes s’auto-évaluent et évaluent les autres étudiants, un processus appelé « peer evaluation ».

 

(1) outre Harvard et MIT, les membres d'edX comprennent : UC Berkeley, U of Texas, Australian National U., Boston U., TU Delft, U. of Queensland, Berkley college of music, Caltech, Columbia, Cornell, Dartmouth, Davidson, EPFL, ETH Zürich, Georgetown U., Hong Kong U. of Science et Tech., IIT Bombay, Karolinska Inst., Kyoto U., McGill, Peking U., Rice, Seoul National U., TU München, Tsinghua U., U. catholique Louvain, et bien d'autres, mais aucun établissement français

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19 octobre 2013 6 19 /10 /octobre /2013 15:50

L'un des biens le plus précieux acquis dans nos Grandes Ecoles en France, est ce sentiment d'appartenance à une famille, à une communauté formée par l'ensemble des diplômés.

L'expérience du campus, les projets menés ensemble, les liens tissés dans les clubs et les équipes sportives constituent un socle sur lequel se bâtit ce sentiment, cet esprit de corps. Le lien est d'abord au sein de la promotion et des promotions voisines que l'on a connu sur le campus.

 

Dès la sortie de l'Ecole, pour la plupart des jeunes diplômés, c'est le plongeon dans le monde professionnel où ils sont confrontés à tout un ensemble de relations entièrement nouvelles et à des défis qu'ils aimeraient bien pouvoir surmonter, comme : pouvoir se frayer un chemin dans la grande entreprise dans laquelle on est rentré. C'est alors que souvent, l'on prend conscience que, dans ce nouvel environnement, c'est important de garder le contact avec ses camarades les plus proches, et de fil en aiguille, de nouer des contacts avec d'autres diplômés. Alors, le lien « familial » se développe et s'étend bien au-delà des promotions voisines, parmi les membres qui sont dans la même région et/ou le même domaine d'activité.

 

A la différence des contacts strictement professionnels, la relation est sans enjeu et la confiance s'établit facilement parce que, du fait de l'appartenance à la famille, il existe de nombreux points communs, des souvenirs et des valeurs partagés. C'est un grand atout qui permet à chacun de débuter sans difficulté dans le « réseautage », de roder sa communication et d'avoir rapidement des retours encourageants. Le rôle des Associations de diplômés au sein des groupes aussi bien régionaux, internationaux, que professionnels ou entreprises, est de favoriser cette « mise en réseau ».

 

De même, toutes les associations entretiennent avec soin un annuaire. C'est l'outil essentiel d'activation du réseau qui permet ainsi d'entrer immédiatement en relation avec un camarade spécialiste de la propriété industrielle ou un entrepreneur en Chine ou au Brésil.

 

Bien que cela n'ait sans doute jamais été évalué, les réseaux de diplômés français jouent certainement un rôle important dans l'efficacité de l'économie française et la capacité de ses entreprises à se développer à l'international. En effet, ils facilitent les prises de contact, les échanges d'information informels et l'instauration rapide de relations de confiance.

 

 

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31 août 2013 6 31 /08 /août /2013 18:03

Un récent article dans Les Echos de Philippe Jamet, président de la Conférence des Grandes Ecoles m'amène à réagir avec véhémence. Il prétend que : « le manque d'ingénieurs est un mythe ». Il s'appuie notamment sur le développement des formations en alternance (12% des diplômés chaque année) et des cursus intégrés qui recrutent après le bac (16%). Il conclut que le problème n'est pas la pénurie d'ingénieurs mais le manque d'activité industrielle en France. Il mentionne également que les salaires d'ingénieurs ont subi une érosion depuis 20 ans, ce qui démontrerait selon lui l'absence de pénurie.

Au diapason de cette position, les media se félicitent en précisant que le nombre de diplômes d'ingénieurs décernés en France n'a jamais été aussi élevé : 30 291 en 2011, 121 600 étudiants dans les écoles, soit deux fois plus qu'il y a 20 ans et 5 fois plus qu'il y a 40 ans !

De nombreux indicateurs conduisent toutefois à penser qu'il y a effectivement une pénurie d'ingénieurs et de scientifiques ; des efforts considérables ont été faits depuis 50 ans et prétendre que leur nombre est suffisant, pourrait conduire à relâcher ces efforts ; heureusement cela est peu probable, car toutes les écoles d'ingénieurs que je connais, ambitionnent d'élargir leur offre et d'augmenter leurs promotions.

 

A l'opposé de P. Jamet, dans une interview tout récent, Carlo Bozotti, président de STMicroelectronics, s'inquiète et indique qu'en 2020, selon plusieurs études, l'Europe sera confrontée à un déficit de 500 000 ingénieurs et de 900 000 experts en TIC (technologies de l'information et de la communication), ce qui pour la France, donnerait un déficit d'environ 60 000 ingénieurs et 110 000 experts !

 

En Allemagne cependant, un consensus est établi sur la pénurie d'ingénieurs dans le pays. Angela Merkel elle-même, demande qu'on attire plus d'étudiants dans les filières scientifiques. Selon la fédération des ingénieurs VDI, 100 000 postes d'ingénieurs sont vacants et, compte tenu des départs, il faudra 81 000 nouveaux diplômés par an à partir de 2014, alors que le niveau actuel est de 50 000 seulement – soit 40 000 en France au prorata de population (65 millions versus 80). Etant entendu que la part de l'industrie dans l'économie allemande est à peu près le double de ce qu'elle est en France, il est cependant incontestable que, depuis longtemps les ingénieurs et scientifiques travaillent dans bien d'autres domaines que l'industrie comme la banque, la distribution, la logistique, les services informatiques, le conseil. On peut donc estimer que les ingénieurs sont employés de manière sensiblement équilibrée dans tous les domaines économiques, et en reprenant l'évaluation allemande, il faudrait environ 66 000 nouveaux diplômés en 2014 et le déficit français serait ainsi gigantesque.

 

La situation est d'autant plus inquiétante que tout indique que nos jeunes diplômés sont attirés par le grand large et vont de plus en plus travailler à l'étranger. Selon une récente enquête d'un cabinet de recrutement (Universum), 75% des étudiants français seraient prêts à partir sans hésiter si on leur offrait un emploi, soit un nombre très supérieur aux autres pays de l'OCDE (61%). L'étude 2013 de Deloitte et de l'Ifop sur l'Humeur des jeunes diplômés annonce que 27% d'entre eux situent leur avenir professionnel à l'étranger, alors que l'étude 2012 donnait 13% seulement ! On peut penser qu'une progression aussi rapide soit susceptible d'un retournement équivalent et qu'il y a loin de la parole à l'acte.

Espérons que la tendance va effectivement s'inverser, mais je ne peux m'empêcher de penser que nos politiques quel que soit leur bord, sont responsables de cet état d'esprit chez nos jeunes diplômés.

 

 

 

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31 mars 2013 7 31 /03 /mars /2013 20:52

Selon une étude récente de l'OCDE, les économies des Etats-Unis, de l'Allemagne et de la France ont cru en 2012 respectivement de 1,9%, 0,4% et de –0,3%. Les prévisions pour le premier et le deuxième trimestres 2013 sont pour les mêmes, en rythme annualisé  : +3,5 et 2% (Etats-Unis), 2,3 et 2,6% (Allemagne), –0,6% et 0,5% (France) ; il y a clairement une divergence croissante entre la France et ses deux partenaires économiques principaux.

 

Et pourtant, nos gouvernants répètent à l'envi qu'ils mettent tout en oeuvre pour stimuler la croissance et conjurer le chômage et réclament des mesures européennes pour les aider dans leur efforts de stimulation. A voir les perspectives allemandes et celles d'autres pays du « noyau dur » de la zone Euro (Autriche, Finlande, Pays-Bas), ces réclamations ne risquent pas d'être satisfaites, nos amis européens considérant que la croissance est au rendez-vous pour eux et qu'aucun changement de politique n'est nécessaire. Plus que jamais, le dicton « Aide-toi le ciel t'aidera » devrait inspirer nos politiques : c'est à nous de traiter nos problèmes qui sont nombreux, comme les autres les ont traités, alors la croissance appelée de nos voeux sera plus sûrement au rendez-vous.

 

 

Les coûts de main d'oeuvre 

 

Un exemple remarquable est celui des coûts de main d'oeuvre. Le diagramme ci-dessous fait apparaître la grande divergence apparue entre 1999 et 2012 entre les pays du noyau dur, ceux du sud de l'Europe et la France : index 112 en 2012 pour les premiers, 132 pour les seconds et 130 pour la France. L'écart de compétitivité est de 18 points en défaveur de la France par rapport au noyau dur. On voit clairement l'impact des 35h qui a augmenté les coûts en 2 ans autant que 13 ans d'évolution pour le noyau dur.

Couts MO

 

Si le crédit d'impôt compétitivité apporte vraiment un gain de 4%/6% comme on nous le prétend, cela sera cependant loin d'être suffisant pour remonter le handicap de l'économie française face à ses voisines.

 

 

Le levier de l'emploi public

 

Si l'on examine l'évolution récente des Etats-Unis, il semble qu'il existe un élément très puissant conduisant à la croissance et à la réduction du chômage. Et ce qui est remarquable est qu'il est totalement sous le contrôle des gouvernants : il s'agit de l'emploi public.

Point n'est besoin de l'aide des pays voisins, de manipuler les taux de change, de provoquer de l'inflation :     réduire la charge de l'emploi public, c'est un moyen qui paraît efficace si l'on regarde ce que les Etats-Unis ont réussi à accomplir.

Entre 2010 et début 2013, les Américains ont supprimé 1.2 millions d’emplois dans le secteur public, faisant passer le nombre de fonctionnaires de 23 millions à 21.8 millions. En parallèle, 5.2 millions d’emplois ont été créés dans le privé avec une progression de 129 millions d’emplois à plus de 134 millions d’emplois.

On notera que cela a été accompli sous la présidence d'Obama qui n'est pas particulièrement réputé comme un militant du « moins d'Etat » – c'est plutôt le fond de commerce des républicains.

On constate un ratio de un à 5 : 5 emplois privés ont été créés aux Etats-Unis dans le même temps où un emploi public a été supprimé.

A comparer avec la France : 100 000 emplois ont disparu en 2012 (on prévoit 152 000 destructions en 2013) après une stagnation en 2010 ( +32 000 emplois créés) et en 2011 (+ 27 000 emplois), soit une perte de 41 000 emplois entre 2010 et 2012. Dans le même temps, l'emploi public est resté quasiment inchangé, le non remplacement d'un fonctionnaire sur deux étant compensé par la croissance des emplois dans les collectivités locales. Nous avons 6 à 7 millions de fonctionnaires et employés payés par l'argent public.

Rèvons une minute : supprimons 300 000 emplois publics (soit l'équivalent de ce qui a été supprimé aux Etats-Unis), en admettant la même efficacité, il serait possible de créer 1,5 millions d'emplois privés, soit un solde net de 1,2 millions.

 

 

D'où vient l'effet de levier ?

 

Quelques pistes :

- un emploi privé est nécessairement financé par un besoin ou justifié par la création de valeur qu'il apporte. Si le besoin n'existe plus ou si la création de valeur disparait, l'emploi correspondant est supprimé. Qu'en est-il de l'emploi public ?

- l'emploi public consomme des ressources financées par l'impôt qui est prélevé sur le secteur privé et réduit sa capacité de croissance.

 

 

 

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31 janvier 2013 4 31 /01 /janvier /2013 22:02

Depuis 2008, les Français réduisent leur recours au crédit, ils empruntent de moins en moins. C'est ce que l'on constate d'après les résultats d'une enquête menée auprès de 13 000 ménages en novembre 2012 par la SOFRES pour l'Observatoire des Crédits aux Ménages. En 2012, 48,6% des ménages détenaient un crédit contre 52,6% en 2008. C'est le niveau le plus bas depuis 1989 !

 

Une baisse du crédit à la consommation

 

Ce n'est pas le crédit immobilier qui baisse : il est stable autour de 31%. C'est le crédit à la consommation qui est en forte baisse : seuls 27,6% des ménages détiennent un crédit à la consommation en 2012. De 2001 à 2011, le taux a fluctué entre 30,1% et 35,4%. Le rapport d'enquête soutient que c'est la crise de la dette souveraine en 2011 qui a conduit les ménages à réviser leurs projets et à abaisser leurs emprunts. On voit là une interprétation typique de la part d'un économiste français : il prétend qu'un événement macro économique entraîne une modification de comportement, plutôt micro économique. Comme si chacun avait pris conscience que la crise de la dette souveraine avait une influence majeure sur sa vie quotidienne et était conduit à réagir. Cela n'a pas beaucoup de sens.

 

Le crédit destiné à l'achat des voitures est certainement une part importante du crédit à la consommation. Et une proportion probablement relativement stable des clients a recours à un crédit. Le marché automobile français a baissé de 14,6% en 12 mois : tout naturellement on peut estimer que le crédit automobile devrait baisser d'un montant similaire. La diminution du crédit à la consommation est de 9% en un an, de 30,2% à 27,6%. Pourquoi le marché automobile français a t'il baissé ? En grande partie, par suite d'un report des achats à plus tard : les véhicules sont de plus en plus fiables, sont garantis pendant des périodes plus longues. Alors, dans le climat actuel de grande incertitude sur l'évolution de la fiscalité et sur la situation dans beaucoup d'entreprises, finalement sur les choses qui touchent vraiment les français tous les jours – et non les phénomènes macro économiques, il n'y a pas grand inconvénient à différer un achat de cette importance, à reporter la signature d'un nouvel emprunt et à réserver à d'autres usages les sommes disponibles.

 

Un taux d'épargne exceptionnel

 

Par ailleurs, le taux d'épargne (% du revenu qui est épargné) des Français est au plus haut et bat tous les records : il s'est établi à 16,2% en 2012. A titre de comparaison, il est de 10,1% en Allemagne, 5,3% en Grande Bretagne, 3,7% aux Etats-Unis et en moyenne de 5,7% dans les 27 pays de l'UE.

 

A l'évidence, les particuliers restreignent leur propension à dépenser à la fois en empruntant moins et en épargnant plus. Pourquoi ? Ne serait-ce pas la conjonction de deux éléments :

  • l'Etat étant toujours plus dépensier sans manifester de volonté réelle de réduire son train de vie, les particuliers s'attendent à ce que les impôts vont augmenter ; il est donc important de mettre de côté ce qui sera nécessaire pour payer les futurs impôts ;

  • le régime de retraite du privé par répartition est en difficultés et les particuliers s'attachent à épargner pour préparer leur retraite ;

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24 décembre 2012 1 24 /12 /décembre /2012 17:00

Ronald Coase, prix Nobel d'économie, 102 ans le 29 décembre cette année, vient de publier un article dans la Harvard Business Review sur son thème fétiche : que l'économie telle qu'elle est enseignée, expliquée dans les livres et pratiquée est déconnectée de la vie des entreprises et encore plus de la création d'entreprises et de l'entrepreneuriat ; elle devient de plus en plus un instrument théorique que les gouvernements utilisent pour gérer, un instrument qui n'est plus ancré dans l'étude empirique du fonctionnement de la vie économique, dans l'étude de l'homme et de l'économie telle qu'elle existe.

 

Ronald nous explique que cela n'a pas toujours été le cas : quand l'économie moderne a émergé, les premiers auteurs, Adam Smith avec la Richesse de Nations puis Alfred Marshall, ont porté leur attention à l'étude empirique de la croissance économique et du développement des richesses. L'économie avait alors un sens pour les entrepreneurs.

 

Depuis l'économie est devenue une profession, développant des théories abstraites et impropres à guider les entrepreneurs et les dirigeants dans leur quête permanente de création de nouveaux produits à un coût toujours plus bas. Il en résulte que les entrepreneurs et les managers s'appuient sur leur propre jugement et leur expérience pour prendre des décisions.

Pire, en temps de crise, lorsque les difficultés surgissent en termes d'emploi et d'innovation, ils se tournent vers les gouvernements qui eux-mêmes font souvent confiance aux économistes et à leur vision théorique du monde économique.

 

Ronald en conclut qu'avec l'émergence de l'économie de marché et de l'entrepreneuriat dans les pays d'Asie et d'Afrique, il est temps de se remettre à étudier l'homme tel qu'il est et le système économique tel qu'il existe, avec sa grande diversité de cultures, d'institutions et d'organisations.

 

Autour de nous, on s'aperçoit depuis des décennies que l'enseignement de l'économie, une discipline universitaire qui a envahi les classes du secondaire, est largement inutile pour la vraie vie dans les entreprises. Il suffit d'ailleurs de constater que les diplômés en économie ne trouvent guère d'emplois que dans la sphère publique, et plus tard dans les cercles et autres think tanks qui essaient d'influencer les politiques. On prétend à tout moment que les Français ne comprennent pas l'économie, mais ne serait-ce pas simplement parce qu'elle est isolée de la vie réelle des entreprises, de là où ils travaillent ; quel lien y a t'il entre les théories des prix et de la monnaie et la vie de tous les jours ? La plupart des gens se disent : laissons l'économie aux experts, je n'en vois pas l'utilité à mon niveau, pour développer mon activité, mon commerce, mon entreprise, pour ma vie quotidienne.

De plus, les économistes ne sont pas crédibles, qu'ont-ils fait depuis 30 ans qu'un chômage élevé sévit en France ? S'appuyant sur les théories de Keynes, ils ont prôné toujours plus d'interventions de l'Etat, un politique de déficit public supposé générateur de croissance économique et de plein emploi. Avec quel résultat ?

 

Bien sûr me dira t'on le lobby de la profession est puissant et nourri chaque année par l'arrivée de nouveaux diplômés. Il y a 40 ans, on n'enseignait pas l'économie au lycée … revenons donc à cette situation et développons plutôt la sensibilisation des jeunes aux entreprises, à la vrai vie économique, là la valeur se crée tous les jours.

 

Dans son dernier rapport « Pour un New deal entrepreneurial », Philippe Hayat, créateur de l'association 100 000 entrepreneurs, ne dit pas autre chose dans ses premières recommandations : populariser l'entrepreneuriat auprès du grand public, assurer une sensibilisation structurée à l’entrepreneuriat pour tous les collégiens et lycéens de 13 à 18 ans.

Mais il ne va pas assez loin en omettant de proposer de remplacer l'enseignement de l'économie par celui de l'entrepreneuriat. Pourtant, il faudra bien un jour faire un choix : lequel de l'entrepreneuriat ou de l'économie est le plus important pour favoriser l'innovation, la création d'emploi et de richesse ?

 

 

 

 

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31 octobre 2012 3 31 /10 /octobre /2012 22:55

Robert J. Gordon, professeur d'économie à l'université de Northwestern, près de Chicago, et chercheur à l'OFCE (Paris), a publié en septembre un « papier » où il s'interroge sur les causes du ralentissement de la croissance aux Etats-Unis. Son analyse remonte aux premiers jours de la première révolution industrielle appelée IR1, qui s'est produite à partir de 1750 en Angleterre. Avant cette date, il n'y a eu pendant des siècles, qu'une infime croissance économique. Jusqu'en 1906, R. Gordon considère que l'Angleterre a devancé le reste du monde en productivité et donc en revenu par tête. A cette date, les Etats-Unis sont passés devant l'Angleterre et sont restés jusqu'à aujourd’hui, le numéro un en terme de revenu par tête.

 

 

Et les autres pays ?


On remarque que, bien qu'il n'en fasse pas mention, R. Gordon ne tient pas compte des micro états dont le revenu par tête est supérieur ... L'hypothèse implicite de R. Gordon est que le cours de la croissance économique de tous les pays a suivi et va suivre avec plus ou moins de retard le chemin emprunté par l'Angleterre d'abord (jusqu'en 1906) et les Etats-Unis ensuite, la référence étant le revenu par tête. On conçoit que les pays émergents, au cours des 20 ou 30 dernières années, ont connu un rattrapage à marches forcés, bien sûr facilité par le fait que les découvertes et les inventions des 250 dernières années sont derrière nous et qu'ils ont bénéficié ainsi de progrès de productivité très rapides. Il est prévisible que les causes qui ralentissent la croissance des Etats-Unis, vont aussi impacter les autres pays, y compris les émergents, avec plus ou moins de retard.

 

 

La croissance des années 1300 à 2100


R. Gordon nous indique que le revenu annuel par tête ramené à la valeur d'aujourd'hui, a été seulement multiplié par 3 en 5 siècles de 1300 à 1800, augmentant de 1 150 $ à 3 450 €. En 1906, il était de 6 350 $ en Angleterre et aux Etats-Unis, soit pratiquement un doublement en un siècle. La croissance a été ralentie jusqu'à la crise de 1929 puis s'est soudainement accélérée, doublant de 8 000 € à 16 000 € en 28 ans (de 1929 à 1957) et doublant à nouveau à 32 000 $ en 31 ans, en 1988.

En 2007, l'année de base utilisée par R. Gordon pour sa prospective, le revenu par tête était de 44 800 $, soit une progression de 40% seulement en 19 ans : il y a donc maintenant un ralentissement significatif de la croissance ; il prévoit que la croissance jusqu'à 2100, va retomber au niveau du 19è siècle soit un doublement en un siècle ! Ceci correspond à une croissance moyenne de 0,7% par an. R. Gordon observe que la croissance moyenne a été successivement de 2,33% par an de 1891 à 1972, puis de 1,38% jusqu'en 1996, de 2,46% de 1996 à 2004 et de 1,33% par an jusqu'en 2012.

 croissance économique de 1300 à 2012

Croissance économique en % par an de 1300 à 2012 en Angleterre (bleu) et aux Etats-Unis (rouge) (extrait de Policy Insight nº63 - sept 2012)

 

 

Les trois révolutions industrielles IR1, IR2 et IR3


Pourquoi la croissance a t'elle été si rapide au début du XXè siècle ? Tout simplement parce que la seconde révolution industrielle (IR2) entre 1870 et 1900 connut en peu de temps les inventions qui ont eu le plus d'influence sur l'amélioration des conditions de vie : après le télégraphe inventé en 1844, l'éclairage électrique et le moteur à explosion apparurent ensemble en 1879. Pendant cette courte période et avant 1929, le téléphone, le phonographe, la photographie, la radio et les films, les ascenseurs et les escaliers mécaniques, les automobiles, les camions et les avions, les autoroutes, les supermarchés, les grands magasins et la vente par correspondance, l'eau courante, le chauffage central et les égouts, la chimie, les plastiques et les médicaments, les lave-linges et les réfrigérateurs furent tous inventés ou créés. Ces inventions ont été suivies par d'autres comme la télévision, la climatisation qui ont eu leur plein effet avant 1970. Mêmes les ordinateurs ont eu l'effet le plus marquant au début des années 60, tôt après leur invention, remplaçant le travail manuel ou répétitif par des automatismes ; par exemple, les opératrices téléphoniques ont rapidement disparu et les banques et les compagnies d'assurance ont émis des documents générés par leur informatique. Les premières cartes de crédit ont été introduites dans les années 50. R. Gordon indique que les ordinateurs ont eu surtout pour effet de prolonger la période de croissance rapide générée par IR2 jusqu'au début des années 70 et que par la suite, ils auraient empêché que le freinage de la croissance soit plus sévère. IR2 a eu ainsi un impact bien plus fort et durable que IR1.

 

 

On constate que la troisième révolution IR3 dont on situe le début autour de 1995 et qui nous a apporté l'Internet, le Web, les téléphones portables,... a un impact bien moins important que IR2 sur les augmentations de productivité et donc sur la croissance. Son impact a surtout été de plus courte durée : seulement 8 ans à comparer aux 81 ans qu'a duré IR2. Les innovations récentes comme les smart phones ajoutent simplement des fonctions existant sur d'autres outils personnels ...

 

 

Un trait commun aux innovations de la révolution IR2, de 1870 à 1970, c'est que la plupart des améliorations ne pouvaient arriver qu'une seule fois ; par exemple la température dans les habitations est passée d'une alternance entre un froid glacial l'hiver et une chaleur étouffante l'été, à une température contrôlée toute l'année : cette transformation ne peut se produire à nouveau. Après 1970, les innovations sont devenues souvent en quelque sorte des innovations de second tour, dont l'effet sur la productivité est bien moindre. Le traitement de texte des ordinateurs personnels n'a fait que remplacer les machines à écrire à mémoire qui avaient déjà très largement simplifié le travail de secrétariat.

 

 

Que valent les innovations des années 2000 comparées à celles de IR2 ?

 

R. Gordon décrit une expérience illustrant l'importance des inventions de IR2 : deux choix sont proposés, A ou B. Avec A, on conserve la technologie de 2002, y compris un ordinateur sous Windows 98 capable d'accéder aux sites marchands, l'eau courante et des wc intérieurs, mais on ne peut utiliser ce qui a été inventé après 2002. Avec B, on obtient tout ce qui a été inventé dans les dix dernières années, jusqu'à Facebook, Twitter et l'iPhone ou l'iPad mais il faut porter l'eau jusque chez soi et aller à l'extérieur, peut-être sous la pluie ou de nuit, pour accéder aux wc. Quelle option choisit-on ? quelles sont les inventions les plus importantes ?

 

 

Qu'en est-il du futur ?

 

R. Gordon rappelle qu'il ne faut jamais sous-estimer le potentiel des innovations, citant le président d'IBM, Thomas Watson qui estimait que le marché mondial pour ordinateurs était de 5 systèmes maximum ou Bill Gates qui déclarait qu'une mémoire de 640 kilooctets était suffisante pour une disquette.

 

Mais l'innovation est désormais confrontée à 6 facteurs qui en freinent les effets :

- la démographie : la population des retraités augmentant en pourcentage de l'ensemble de la population, la proportion des actifs diminue et le nombre d'heures travaillés par tête diminue également, et la production par tête augmente moins vite que la productivité. On notera que les pays européens traitent indirectement la question en se focalisant sur la maintenance des retraites par répartition : en repoussant l'âge de la retraite, on augmente la capacité de production grâce à un nombre d'heures travaillés plus élevé, et on stimule la croissance. Le lecteur notera qu'en France, une première fois au début des années 80, l'âge de la retraite passant de 65 à 60 ans, a sûrement eu un effet de freinage sur la croissance et que le présent gouvernement qui appelle la croissance de ses voeux à toutes les occasions a pris une mesure qui freine la croissance en ramenant la retraite à 60 ans pour certains. Au contraire, les Allemands sont en train de passer à une retraite à 67 ans ...

 

- la formation : aux Etats-Unis, il apparait que le niveau moyen de la formation des jeunes se détériore depuis plus de 20 ans. Une des causes est l'inflation du coût des études supérieures qui limite de plus en plus l'accès aux catégories les plus pauvres et fait que les autres accumulent des dettes qui biaisent leur orientation de carrière. R. Gordon cite également les mauvais scores des élèves américains dans les tests PISA de l'OCDE. Il est évident que le même effet est présent en France, notamment en considérant le nombre de jeunes arrivant sur le marché du travail, ayant des difficultés en connaissances de base et sans formation professionnelle, ainsi qu'en observant le biais de notre enseignement supérieur du côté des catégories les plus favorisées. La vrai question pour la France est de savoir si la situation s'améliore, devient pire ou est stabilisée. Aux Etats-Unis, elle empire et c'est un frein à la croissance.

 

- l'inégalité croissante : aux Etats-Unis, de 1993 à 2008, la croissance moyenne du revenu par foyer a été de 1,3% par an mais pour 99% d'entre eux, la croissance a été de 0,75% par an seulement, les 1% les plus aisés captant la différence de 0,55%. D'où une croissance réelle diminuée de 0,55% pour l'immense majorité de la population. En France, en se focalisant sur le maintien du pouvoir d'achat, nos politiciens depuis 20 ans ont su limiter la croissance de l'inégalité avec de nombreux outils. On peut donc considérer que ce facteur est quasiment absent ici.

 

- la globalisation : R. Gordon prétend que la globalisation, en mettant en concurrence la main d'oeuvre bon marché des pays émergents bénéficiant de capacités techniques croissantes avec celle d'un pays avancé comme les Etats Unis agit comme un frein sur la croissance. Il cite la théorie d'égalisation du facteur prix de Hecksher-Ohlin-Samuelson. On peut argumenter exactement le contraire en indiquant que, grâce aux produits importés bon marché, le pouvoir d'achat des individus et des entreprises augmente induisant une croissance économique. Sur ce point, j'observe que le seul impact vraiment significatif sur la croissance est celui provenant d'une balance commerciale en déficit avec les pays émergents causée par l'importation massive de produits venant de ces pays. C'est le cas des Etats-Unis comme de la France. Une balance commerciale en déficit induit un appauvrissement du pays importateur donc une perte de croissance du même montant. Si les Etats-Unis et la France réussisaient à équilibrer leurs échanges, ils regagneraient plusieurs dixièmes de point de croissance. Une petite partie de la croissance de l'Allemagne, du Japon, de la Chine provient de leurs excédents commerciaux.

 

- énergie et environnement : ce facteur est à l'évidence de plus en plus important, par les contraintes en termes de coût des ressources et de dégradation de l'environnement. R. Gordon renvoie simplement la balle aux "mauvais", l'Inde et la Chine en l'espèce, qui produisent à eux deux maintenant plus de CO2 (10,3 milliards de tonnes en 2010) que les Etats-Unis (5,5 milliards de tonnes mais tout de même 2,3 milliards d'habitants en Chine + Inde contre 350 millions ...) et, selon lui, ne veulent pas contrôler leurs émissions, puisqu'à la même époque de développement économique, il y a 20 ou 40 ans, les pays avancés ne se souciaient pas d'émissions de CO2 ... Il résume cependant assez bien la question en termes économiques : le traitement des questions d'environnement et d'épuisement des ressources représente un compensation de la croissance économique passée, en quelque sorte une dette contractée lors des périodes de croissance rapide qu'il va falloir rembourser.

 

- le poids des dettes : en 2007, les américains avaient une dette équivalente à 133% de leurs revenus annuels ; ils cherchent maintenant à réduire cette dette, à épargner et cela a un impact négatif sur leurs dépenses. Pour l'instant, l'Etat américain ne prend pas vraiment de mesures pour réduire sa dette qui est abyssale mais si cela se produisait un jour, il y aurait un impact sur la croissance. En France, la question sur le devant de la scène est la dette publique et la manière dont le gouvernement compte la réduire sous la contrainte des marchés.

 

On reste un peu sur sa faim avec cet ensemble de 6 facteurs freinant la croissance économique. Il y manque notamment :

- l'intervention des Etats

Je pense que R. Gordon n'est pas républicain, car il aurait alors à coup sûr indiqué que les gouvernements et états de toutes sortes freinent la croissance économique par leurs interventions, par la mauvaise utilisation des fonds collectés via les impôts. Il est avéré que la création d'un emploi public détruit plus d'un emploi privé et que les emplois privés sont seuls producteurs de valeur et générateurs de croissance économique au sein des entreprises. Dans ce domaine, la France a un handicap très important et les efforts de réduction des emplois publics doivent être poursuivis.

- le commerce international

Un autre élément qui a joué un rôle très favorable depuis la deuxième guerre mondiale est la libéralisation du commerce international et la baisse des droits de douane de toutes sortes. De même, pendant toute la période de 1300 à 1750, on a pu constater que la liberté de commercer et une diminution des droits de douane, octroi et autres taxes sur la circulation des biens ont conduit à une croissance économique significative. Les efforts de l'OMC doivent être poursuivis et que les négociations soient figées depuis plusieurs années, n'a pas aidé la croissance économique mondiale.

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25 septembre 2012 2 25 /09 /septembre /2012 19:26

L'organisateur du forum bien connu de Davos, le World Economic Forum, vient de publier la version 2012 de son étude annuelle sur la compétitivité des nations. Cette étude est réalisée chaque année en collaboration avec de nombreuses universités, écoles et centres de recherche comme HEC, LSE (London School of Economics), Bocconi (Italie), IESE (Espagne), Tianjin (Chine), etc... ce qui garantit sans doute que les données et les résultats soient d'une bonne fiabilité. Curieusement, aucun organisme américain n'est cité parmi les partenaires de cette étude en 2012.

Ces études sont une mine d'informations sur les forces et les faiblesses des nations, et sûrement une ressource pour les entreprises projetant de se développer internationalement.

 

Le classement des nations

 

Cette année les dix premières sont dans l'ordre : Suisse, Singapour, Finlande, Suède, Pays-Bas, Allemagne, Etats-Unis, Royaume-Uni, Hong-Kong et Japon.

La France se classe au 21è rang derrière notamment le Danemark (12), la Norvège (15), l'Autriche (16) et la Belgique (17). Sept pays de l'UE sont ainsi présents parmi les 20 premiers. Les micro-pays tirent remarquablement bien leur épingle du jeu avec Singapour nº2, Hong Kong nº9 et Quatar 11ème.

 

Les autres pays européens se retrouvent plus loin avec : Luxembourg (22), Irlande (27), Estonie (34), Spain (36), Tchèquie (39), Pologne (41), Italie (42), Malte (47), Portugal (49), Slovénie (56), Chypre (58) Slovaquie (71), et la Grèce (96) en lanterne rouge, ce qui n'étonnera personne ! Cette étude confirme la grande disparité de compétitivité existant entre les pays de la zone euro. On peut bien sûr argumenter sur la méthodologie et les résultats, notamment sur la façon dont les différents critères de compétitivité sont pondérés les uns par rapport aux autres. Mais vu la qualité des contributeurs à ces études, il doit y avoir beaucoup de vrai dans ce qu'elles obtiennent. 

 

La Chine qui fait office d'épouvantail sur la scène économique mondiale est toujours au 29è rang, en progression de 5 places seulement depuis 2007. Ceci tendrait à démontrer que la croissance si chère à nos politiques n'est pas liée à la compétitivité : les économies européennes en croissance faible depuis des années se classent toujours largement devant les 5 BRICS, Brésil (48), Russie (67), Inde (59), Chine et Afrique du Sud (52) dont les taux de croissance sont bien supérieurs.

 

Dans la mesure où la méthodologie est maintenue année après année, il est certainement encore plus significatif d'examiner les évolutions depuis 5 ans (avec les données disponibles sur le site du forum).


Examinons d'abord les pays de la zone euro puis les autres de l'Union Européenne :

 zone€

Le tableau ci-dessus montre que, pour certains pays de la zone euro, l'évolution est défavorable et leur compétitivité baisse par rapport aux autres. Que la Grèce et dans une moindre mesure l'Espagne et le Portugal perdent en compétitivité, ne surprendra personne. Mais d'autres pays qui ne font pas parler d'eux : la Slovaquie, la Slovénie et même l'Estonie sont en perte de vitesse. Seule Malte monte de manière marquante dans le classement. Les autres pays conservent à peu près leurs positions (variations de classement ≤ ±5).

 

L'on parle beaucoup du contrôle du déficit public, de la dette excessive que les Etats de la zone doivent contrôler. On évoque de plus en plus le projet de contrôler les budgets. Mais ne devrions-nous pas examiner aussi la compétitivité des économies, les unes par rapport aux autres et leurs évolutions ? Le budget de la l'UE entretient depuis des années des programmes de soutien des régions aux économies les moins florissantes. Est-ce bien efficace ? On peut en douter.

 autres UE

On voit notamment que les pays de l'Europe de l'Est suivent des voies divergentes : la Pologne est nettement sur la meilleure pente, sa proximité de l'Allemagne et des pays du Nord lui étant certainement favorable, alors que la Tchéquie, initialement en avance sur ses voisines, perd du terrain, la Roumanie est en stagnation à un faible niveau, la Hongrie est sur la mauvaise pente, la Bulgarie est elle sur la bonne voie avec un long chemin à parcourir et les trois pays baltes ont des difficultés.

 

A l'opposé, les pays du Centre et du Nord de l'Europe, apparaissent plus que jamais comme un pôle de super-compétitivité, le Centre-Sud (France, Belgique, Autriche) constituant un étage intermédiaire face au Sud et à l'Est ! Contrairement à ce qu'on en entend sur tous les tons, l'Europe n'est pas en déclin : il y a seulement un découplage entre les pays de tête et les autres, certains comme la France ayant de gros efforts à faire pour rejoindre la tête. 

 

La France

 

La France a perdu 3 places entre 2011 et 2012. C'est en grande partie à cause d'une baisse de la confiance dans les institutions (-4 places) et dans le secteur financier (-13 places). Le point fort reste l'infrastructure en transport, énergie et communications qui est l'une des meilleures du monde (4è).

L'enseignement supérieur, l'apprentissage et la formation continue sont seulement 27è. Les autres points forts sont l'adoption par les entreprises des nouvelles technologies permettant des progrès de productivité (14è) et l'innovation (17è).

Le manque de flexibilité du marché du travail, les médiocres relations entre employés et employeurs (111è) et les systèmes d'imposition aux effets pervers (128è) sont perçus comme affectant le plus la compétitivité de la France. Le lecteur notera qu'il n'est pas question du coût du travail !

 

Le reste du monde et les BRICS

 

On constate que les Etats-Unis perdent des places, en particulier, selon l'étude, à cause de la mauvaise opinion des milieux d'affaires envers les institutions et la classe politique et la crainte d'une mauvaise utilisation des fonds publics. Le manque de stabilité macroéconomique reste la plus grande faiblesse du pays (111è).

 BRICS    

Le pays qui paraît progresser le plus rapidement est le Brésil, gagnant 24 places en 5 ans. A l'évidence, pour un chef d'entreprise contemplant la carte du Monde et se demandant vers quel pays porter ses efforts d'investissement, le Brésil est très attirant, avec cependant encore de grands progrès à faire : faible confiance dans la classe politique, faible efficacité des administrations, trop de règlementations, complexité des procédures pour créer une entreprise, effets pervers des impôts. Mais c'est le 7ème marché au Monde.

 

Les 12 piliers de la compétitivité

 

A partir de nombreux travaux d'économistes depuis des dizaines d'année, l'index de compétitivité globale des études a été déterminé comme une moyenne pondérée de 12 facteurs :

  1. qualité des institutions, efficacité de leur fonctionnement, attitudes des gouvernements envers les marchés, indépendance du système judiciaire ;

  2. infrastructure efficace et largement implantée ;

  3. stabilité de l'environnement macroéconomique, niveau de la dette publique et des déficits, des taux d'intérêt, de l'inflation ;

  4. santé publique et qualité du système d'enseignement primaire ;

  5. qualité de l'enseignement supérieur, de l'apprentissage et de la formation continue ;

  6. efficience des marchés de produits et services, niveau de concurrence et des interventions étatiques ;

  7. efficience et flexibilité du marché du travail

  8. degré de développement des marchés financiers, qualité du secteur bancaire ;

  9. rapidité et capacité d'adoption des nouvelles technologies, amélioration de productivité ;

  10. taille du marché, permettant des économies d'échelle ;

  11. degré de sophistication de l'environnement des affaires, profondeur des réseaux, qualité des stratégies d'entreprise et de leur fonctionnement ;

  12. innovations techniques et non techniques (savoir-faire, conditions de travail, …)

 

En regardant ce qui se produit autour de nous depuis quelques mois et en le mettant en perspective avec les 12 piliers de la compétitivité, il y a ample matière à s'inquiéter de l'évolution de l'environnement économique. Sur quels piliers y a t'il eu des progrès ? Ne constate-t'on pas qu'il y a un plus grand nombre de piliers en régression ?

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23 juillet 2012 1 23 /07 /juillet /2012 21:29

Ce qui est incontestable, c'est que les prix de l'immobilier ancien ont augmenté globalement d'environ 100% en 15 ans en France. De nombreux observateurs en concluent qu'il existe une bulle immobilière, qu'elle va éclater ou se dégonfler comme cela s'est produit récemment ailleurs aux Etats-Unis et en Espagne ...

 

Mais qu'est-ce qu'une bulle ? Selon Joseph Stiglitz, prix Nobel d'économie, "Une bulle est un état du marché dans lequel la seule raison pour laquelle le prix est élevé aujourd’hui est que les investisseurs pensent que le prix de vente sera encore plus élevé demain, alors que les facteurs fondamentaux ne semblent pas justifier un tel prix."

Qu'entend-on par facteurs fondamentaux ? L'indice des prix à la consommation, les taux d'intérêt, le revenu disponible par ménage, l'offre et la demande de logements,...

 

Plusieurs experts dont l'économiste Jacques Friggit et le cabinet d'études PrimeView, comparent l'évolution des prix avec le revenu disponible par ménage. Comme le montre le diagramme ci-dessous, de 1965 à 2000, les prix de l'immobilier (courbe noire) ont été relativement stables par rapport à ce paramètre : ils ont varié dans un « tunnel » compris entre 0,9 et 1,1 fois le ratio prix/revenu de 1965 pris comme comme base de référence.

 

Prix immo

 

Ces mêmes experts en concluent que la disproportion entre prix et revenu disponible par ménage est devenue telle que la bulle ainsi formée ne peut que disparaître. Ils prétendent que les prix baissent actuellement partout, même à Paris. PrimeView ajoute même que le point bas des prix immobiliers sera atteint dans sept à dix ans, à raison d'une baisse de 7% par an !

 

Est-ce bien crédible ? Je suis tenté de penser que la stabilité remarquable des prix entre 1965 et 2000 constitue en réalité une exception et non la norme. Personne ne se pose la question de savoir pourquoi les prix ont été si stables alors que l'on nous a toujours soutenu qu'il y avait une crise du logement. Une telle stabilité ne conduit-elle pas plutôt à affirmer que l'offre et la demande ont été quasiment équilibrées pendant cette période ; la prétendue crise du logement n'appartiendrait qu'à l'imaginaire politique. Le marché immobilier est certes très perturbé par de nombreuses influences : succession de régimes fiscaux particuliers, le dernier en date étant le Scellier, logement social, loyer de 48. Mais malgré tout, c'est l'offre et la demande qui au final, doivent faire en sorte que les prix évoluent. C'est pourquoi cette analyse des experts fondée sur le revenu disponible apparaît contestable et que leurs prédictions ne se réalisent pas.

 

Comment prévoir l'évolution des prix de l'immobilier ?

 

Sur le diagramme ci-dessus, on observe clairement que l'évolution du niveau des prix suit celle du montant global des ventes (courbe verte). Ainsi entre 1986 et 1990, les ventes ont augmenté avec environ deux ans d'avance sur les prix et le pic des ventes atteint en milieu de 1990 a précédé d'un an le pic des prix! Il suffirait donc de surveiller les variations du montant global des ventes pour prédire celles des prix !

 

Des données, semble t'il peu exploitées, fournissent l'information mensuelle sur le montant global des ventes au niveau de chaque département : il s'agit de l'assiette des droits de mutation que l'on peut obtenir sur le site www.cgedd.developpement-durable.gouv.fr. Afin d'évaluer également les revenus tirés par les départements de cet impôt très rentable de nos jours que sont les droits de mutation, j'ai calculé le montant total des droits pour le 75 (Paris) et le 69 (Rhône, département + communes), deux départements très comparables en termes de nombre d'habitants (respectivement 2 233 818 et 1 708 671) (Le montant des droits est en première approximation proportionnel au montant global des ventes).

 

Année

 

Paris (75) - millions €

Rhône (69) - millions €

2000

2005

2007

2008

2009

2010

juillet 2010-juin 2011

2011

juillet 2011-juin 2012

551

952

1 060

962

753

1 042

1 110

1 180

1 347

134

246

296

273

219

305

336

358

362

 

On observe d'abord que Paris tire des droits de mutation environ 4 fois plus de revenu que le Rhône et les communes qui le composent et que la baisse observée en 2009 a été bien vite comblée en 2010.

 

De plus, au lieu de cesser de croître, les ventes continuent de monter, y compris en prenant les douze mois se terminant en juin 2012 – les dernières statistiques connues. Comme nous sommes loin d'avoir atteint le pic des ventes, que cela soit dans le Rhône ou à Paris, en suivant notre raisonnement prédictif, on n'est pas prêt de voir les prix baisser.

 

Alors où est la bulle ?

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30 mai 2012 3 30 /05 /mai /2012 21:39

Il est de bon ton et cette opinion est largement répandue, de proclamer que la R&D est la clef de l'amélioration de la compétitivité, de la réindustrialisation de la France et in fine, de la croissance. Investir toujours plus en recherche et développement, telle serait la solution.

Une des pierres angulaires de l'effort de R&D serait le crédit impôt recherche inventé en 1983. Tout le monde politique est d'accord pour le maintenir : ce serait une aide essentielle à la R&D des entreprises surtout des PME ; il coûte aux contribuables la somme rondelette de 4,5 milliards €, certains souhaitent même le développer. Mais pour quel résultat ? Comme je l'ai évoqué sur ce blog, il s'agit avant tout d'une subvention à l'emploi des chercheurs par les entreprises, sans que l'efficacité de cette subvention soit jamais mesurée.

 

Selon une étude récente du cabinet de conseil McKinsey, le ratio entre investissement en R&D publique et privée et production industrielle se monte actuellement à 14% en France pour 11% aux Etats-Unis et 10% en Allemagne. Faut-il vraiment encore l'augmenter, alors que cela n'a pas empêché l'industrie française de dépérir (aujourd'hui 13% du PIB français) alors que l'industrie allemande se maintient avec vigueur (25% du PIB allemand) ?

 

En fait, avec une candeur étonnante, on entretient la confusion entre R&D et innovation. Investir en R&D serait le meilleur moyen de générer de l'innovation qui elle-même, et cela n'est généralement pas contesté, est à la source de la croissance.

En réalité, l'innovation est par essence multiforme et peut prendre place dans tous les domaines, dans tous les secteurs de l'entreprise ; on peut même affirmer que les innovations commerciales, organisationnelles ou en matière de service sont souvent beaucoup moins coûteuses que la R&D et surtout d'un effet plus rapide et plus important sur les ventes et les emplois. Le contre-exemple en matière de R&D est la création d'une nouvelle molécule en pharmacie qui prend une dizaine d'années avant d'avoir son plein effet sur le chiffre d'affaires et les emplois.

 

Selon une enquête de la Commission européenne, 53% seulement des industries françaises ont innové entre 2006 et 2008 contre 85% des allemandes. Ne serait-il pas dans le domaine de l'innovation en général que les efforts doivent être faits ?

 

L'étude de McKinsey recommande quelques voies pour provoquer une « révolution copernicienne dans les processus d'innovation produit, process et services » :

- mettre en place un marketing stratégique, assurant le lien entre les clients, le marché et le développement des produits,

- associer et renforcer l'offre produit par des services, ces derniers maintenant le contact avec les clients et les fidélisant pendant la vie des produits ; au contraire, la vente des produits eux-mêmes est une opération ponctuelle, ouverte à la concurrence,

- créer un environnement favorable à la concurrence par l'innovation. L'exemple le plus marquant autour de nous est l'arrivée de Free sur le marché des téléphones mobiles qui a été rendue possible par l'action du régulateur des télécoms. Il est certain que l'action de l'Europe dans ce domaine est structurante, perturbe nos monopoles traditionnels et les forcent à innover et à se réinventer. On aimerait que l'action de nos gouvernants soit motrice et non seulement suiveuse des nouvelles règles imposées par l'Europe

 

 

 

 

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