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10 août 2012 5 10 /08 /août /2012 14:34

L'industrie du capital-investissement joue un rôle clef dans la création, le développement et la pérennité de nos entreprises. Il paraîtra évident à mes lecteurs que, pour que cette industrie joue pleinement son rôle, il faut qu'elle soit en bonne santé, qu'elle soit capable d'attirer les talents et les souscripteurs, en un mot que ses performances soient de qualité.

Depuis 2004, l'AFIC (Association Française des Investisseurs pour la Croissance) qui regroupe la plupart des sociétés de capital-investissement, étudie avec Ernst & Young et Thomson-Reuters leurs performances et publie toute une batterie d'indicateurs. Année après année, le nombre d'acteurs participant à l'étude augmente ; en 2011, un total de 887 fonds d'investissement ont répondu à l'enquête.

 

 

Le TRI


Le paramètre clef utilisé par toute la profession pour mesurer la performance des fonds est le TRI – taux de rendement interne, que l'on définit par "le taux d’actualisation qui annule la Valeur Présente en un instant T d’une série de flux financiers".

Vu très simplement, si l'on investit 100 et que n années plus tard, on est remboursé par le fonds à hauteur de X, le TRI est tel que X=100 x(1+TRI)par exemple si X=200 c'est-à-dire que l'investissement a doublé de valeur et n=8 ans, le TRI=21/8– 1= 9,05%. L'équation se complique bien sûr si il y a des flux financiers chaque année au cours de la période où l'on souscrit à un fonds, comme par exemple des appels de fonds successifs, des frais de gestion et des distributions aux souscripteurs sous la forme de liquidités ou de parts. Le TRI net prend en compte l'ensemble de ces flux.

 

Le TRI long terme des fonds depuis 1988 est de 8,31% selon l'étude. Mais les résultats sont très différents selon le type de fonds : capital risque, développement ou transmission :

–1,5% pour le Capital Risque (Venture Capital) qui intervient en phase de création ou au début de l'activité d'une jeune pousse (start-up),

+7,9% pour le Capital Développement auquel la jeune pousse a recours quand elle commence à dégager des profits et souhaite accélérer sa croissance,

+14,5% pour le Capital Transmission qui intervient associé à une équipe de dirigeants et accompagné de financiers pour réaliser l'acquisition d'une entreprise existante. Le recours à une dette pour compléter le financement permet un effet de levier (LBO).

L'étude de l'an dernier donnait des résultats sensiblement différents : 9,3% pour l'ensemble des fonds, –2,5% en capital risque, +8,7% en capital développement et +16,2% en capital transmission.

Sur 10 ans, le TRI est de 8,5% à comparer à la performance de 0,2% de l'indice CAC40 et de 2,5% du SBF250 (les 250 premières valeurs de la Bourse) : le capital investissement est bien plus rentable que la Bourse ... 

 

 

Le capital transmission

 

La baisse des TRI en capital transmission entre 2010 et 2011, serait due à des prix de cession plus bas et une diminution des valeurs d'entreprise en portefeuille ; des prix de cession plus bas reflètent l'atonie du marché de la transmission, causée en grande partie par la réticence des banques à financer des transmissions. Bien que les banques continuent officiellement de financer l'économie, en réalité, les dossiers de transmission prennent depuis des mois l'escalier avec des étapes à de nombreux étages où ils peuvent rester bloqués, tandis que les dossiers de financement de machines ou d'immobilier prennent facilement l'ascenseur …

Cette situation est confirmée par l'étude récente d'Argos Soditic pour la zone Euro, qui observe depuis le début de 2012, une baisse de 9,1% de la valeur des entreprises lors des opérations de transmission LBO avec des prix étant passés de 7,4 x EBITDA(*) à 6,6 x EBITDA ; sur le 1er semestre 2012, l'activité LBO représente seulement 10% des acquisitions d'entreprises moyennes, le niveau le plus bas depuis 2002. Par contre, les acquéreurs industriels et surtout étrangers à la zone Euro (chinois pour un grand nombre d'entre eux ?) pour plus de 50%, sont eux prêts à offrir des prix plus élevés de l'ordre de 7,5 x EBITDA. Les acteurs du capital-transmission ne peuvent pas suivre, faute de pouvoir lever de la dette. Ceci est en partie causé par les contraintes que Bâle III impose aux banques.

La transmission est un facteur essentiel de la pérennité des entreprises. Que peut faire un entrepreneur qui ne trouve pas de solution pour transmettre son entreprise ? Soit il continuera de la diriger dans l'attente d'une solution et jusqu'à quand ? soit il arrêtera l'activité et remerciera ses employés ...

Voilà des éléments qui peuvent faire réfléchir nos têtes pensantes du Ministère du redressement productif : est-il préférable de favoriser le rachat d'entreprises françaises par des industriels venus de pays lointains ou la transmission à un fonds d'investissement européen ?

 

 

Le capital risque

 

Sauf sur une courte période entre 2003 et 2006, l'investissement dans la création d'entreprise a un taux de rendement négatif en France. Naturellement, ce n'est pas le cas pour tous les fonds de capital risque, certains sont bien meilleurs que d'autres : la moyenne par quartile (c'est-à-dire la moyenne des 25% les moins performants, des 25% suivants, et ainsi de suite) va de –12,6% à +9% en passant par –5,4% et –0,6%. Il faut bien avoir en tête qu'il s'agit là de taux annuels et que, par exemple sur 5 ans, le quartile le moins performant correspond à une perte de 50% des sommes investies, le quartile le plus performant donnant une plus value de 54% ! Il sera donc recommandé aux souscripteurs de fonds de capital risque d'être super attentif quant aux compétences et aux stratégies de l'équipe d'investissement avant de se décider pour l'un ou pour l'autre.

Au niveau européen, le Royaume-Uni présente les meilleurs résultats avec +4,5%, l'Allemagne et l'Italie étant à –2,6%. L'Europe fait vraiment pale figure face aux Etats-Unis où le capital risque s'offre un taux de rendement de 14,6% ! Ce taux élevé reflète une plus grande réussite des start-ups américaines, qui se développent plus vite et en plus grand nombre.

Nous avons vraiment des leçons à apprendre de la part des américains : comment obtiennent-ils ce résultat ? En une phrase, on peut dire que l'entrepreneuriat est au premier rang des valeurs américaines et que les américains aiment leurs entrepreneurs. Au point que de nombreux présidents des Etats-Unis sont des entrepreneurs. Regardons de notre côté qui sont nos présidents ? C'est à la fois un symbole et un symptôme ! Aucun de nos ministres actuels ne vient du monde de l'entreprise, comment peuvent-il le comprendre ?

 

(*) l'EBITDA issu du jargon anglo-saxon correspond à l'EBE ou excédent brut d'exploitation, c'est-à-dire le bénéfice de l'entreprise avant amortissements, frais financiers et exceptionnels et impôts.

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