Un nouveau concept d'accompagnement des jeunes pousses est né dans la Silicon Valley il y a environ sept ans, en 2005 : l'accélérateur de start-ups.
A ne pas confondre avec l'incubateur qui se présente comme une plate-forme de services destinés aux porteurs de projet de création d'entreprise en phase de lancement. La gamme des services comprend généralement l'hébergement dans des locaux meublés avec téléphone et Internet ; l'accès à diverses ressources comme une cantine, une médiathèque, une salle de réunion ; l'accompagnement par un tuteur apportant une expertise, un réseau, des conseils ; un soutien dans la recherche de clients et de financement. Les porteurs de projet sont accueillis pour 6 mois, un an ou plus, avec l'octroi d'une aide finançant tout ou partie de l'incubation et remboursable lorsque l'entreprise commence à générer du chiffre d'affaires.
En France, on note la présence dominante d'acteurs publics dans le financement des incubateurs : les régions, les DRIRE, les départements,..., ce qui conduit à regarder les incubateurs comme des structures d'aide à la création d'entreprise, largement dotées avec des fonds publics.
Il faut bien avouer que ce système n'est pas très contraignant pour les créateurs et pourrait être souvent assimilable à un subventionnement.
Les accélérateurs de start-ups lancés aux Etats-Unis sont d'une toute autre nature : ils sont apparus suite à l'évolution récente du marché de la création d'entreprise de haute technologie, après l'éclatement de la bulle Internet. Ayant amassé des fonds considérables venant de leurs souscripteurs, les investisseurs en capital-risque se sont alors trouvés privés de débouchés : il s'est produit un effet combiné de rareté relative des nouveaux projets de création en haute technologie et de baisse des besoins de financement des start-ups. En effet, avec l'avènement des logiciels libres et de langages de programmation de plus en plus performants, avec l'augmentation exponentielle des performances de l'informatique et avec le faible coût de l'Internet et sa grande efficacité pour faire connaître de nouvelles entreprises (bien mieux qu'une agence de communication !), les besoins initiaux des jeunes pousses ont dramatiquement baissé. Pour engager la même somme qu'il y a 20 ans, les investisseurs doivent maintenant étudier de plus nombreux dossiers, y consacrer plus de temps, augmentant ainsi leurs frais.
C'est ici que le concept d'accélérateur est entré en jeu avec la création de Y Combinator et ensuite de TechStars qui sont les deux leaders aux Etats-Unis. Après une sélection très sévère des projets (environ 1% des candidats sont acceptés), les porteurs de projet sont accueillis pour une session intensive de 3 mois seulement pendant laquelle ils reçoivent en moyenne $ 20 000 – ce qui leur permet de consacrer tout leur temps à leur projet, ils sont suivis de très près par des « mentors » de haut vol – des entrepreneurs expérimentés, ils bénéficient de prestations de cabinets d'avocat spécialisés et de bien d'autres supports. A la fin du programme, ils présentent leur projet lors d'une sorte de grand messe, face à plusieurs centaines de business angels et d'investisseurs en capital risque. En échange de leur participation à une session et de la somme reçue, les créateurs accordent en moyenne 8% du capital de leur entreprise à l'accélérateur.
Cela peut sembler cher payer, mais les candidatures affluent et les accélérateurs se multiplient, partout aux Etats-Unis. Depuis 2 ans, ils se développent également en Europe, en s'appuyant notamment sur les franchises de TechStars et de Y Combinator et selon leur modèle : en Angleterre, en Irlande, Espagne, … . Les partenaires financeurs des accélérateurs sont des entreprises comme Microsoft, Google, Verizon, ...
Les résultats sont probants : depuis 2005, Y Combinator a accueilli et financé 380 start-ups ; depuis 2007, TechStars en a accueilli 104, dont 8 seulement n'ont pas survécu, 8 ont été rachetées et 88 se sont développées avec actuellement 656 employés. Le fonds levés par chaque start-up se montent en moyenne à 1 million $ en fin de session.
Et en France ? Mon lecteur ne sera pas étonné d'apprendre que la France est un cas à part ! A ce jour, le seul accélérateur connu, Le Camping, créé début 2011 par l'association Silicon Sentier et localisé dans la mezzanine du Palais Brognart, diffère notablement du modèle développé aux Etats-Unis. Avec Le Camping, il n'est pas question de prise de participation et la somme versée aux participants est faible (4 500 €), la session dure 6 mois, dont 3 d'« accélération » jusqu'à la « démo » et 3 mois de croissance. Il s'appuie actuellement sur 60 mentors, qui, aux dernières nouvelles, n'investissent pas dans les start-ups du Camping.
Les partenaires financeurs du Camping sont : L'Atelier BNP, Google, la banque de détail BNP Paribas, la région Ile-de-France, GL Events, SNCF, le Fonds Social Européen. Là encore une particularité bien française : le poids des financeurs publics, para-public comme la SNCF et institutionnel (la BNP). On peut s'interroger sur les motivations de ces financeurs, mais leur apport est bien sûr toujours bon à prendre.
Nous pouvons souhaiter la meilleure réussite au Camping et qu'il se crée des émules ailleurs en France. Nous verrons dans un an ou deux si le modèle mis en place perdure et si les résultats sont à la hauteur des attentes, c'est-à-dire similaires à ceux des cousins d'outre Atlantique.