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18 octobre 2015 7 18 /10 /octobre /2015 15:21

Carbon3D fondée en 2013 par Joseph DeSimone et localisée à Redwood City dans la Silicon Valley a pour ambition de réaliser des systèmes d'impression 3D qui soient véritablement des outils de production de série et non plus seulement de prototypage et de fabrication en petites quantités.

L'objectif est de réduire les coûts de production dans un rapport de l'ordre de 1/30 par rapport aux solutions actuelles.

 

Le principal obstacle à une véritable industrialisation de l'impression 3D est la vitesse de réalisation des pièces. Actuellement, cette vitesse est encore similaire à celle que l'on obtient par l'usinage avec des machines à commande numérique qui typiquement réalisent une pièce à la fois, souvent en plusieurs heures, la durée étant directement liée à la complexité de chaque pièce.

On est très loin de la vitesse de production en plasturgie ou injection de métal qui sort des pièces de haute précision et en bonne matière – comme l'ABS -PC ou l'aluminium, à des cadences de l'ordre de la seconde. Les temps machine – qui fonctionnent en automatique, par pièce étant très faibles, le coût des pièces se rapproche de celui de la matière, surtout quand les séries sont longues. Plus les séries sont longues, moins les temps de lancement et de mise au point et les outillages n'ont d'influence sur les coûts unitaires. On observera au passage que, dans ces conditions, le marché des matières premières (plastiques, métal) étant mondial, les coûts de production ont tendance à se rapprocher entre notre pays et les pays lointains, justifiant souvent des relocalisations.

 

Les ambitions de Carbon3D sont tout à fait intéressantes mais de là à se substituer aux techniques de l'injection plastique et métal, il y a encore beaucoup de chemin à faire.

 

Depuis sa création, Carbon3D a réussi à intéresser de nombreux investisseurs de poids ; elle a déjà effectué 3 levées de fonds (11 mill. $ en décembre 2013, 30 mil. $ en mars 2015, 100 millions $ en août 2015, total 141 millions $) dont la dernière rassemble Google Ventures, Reinet Investments, Yuri Milner, F.I.S. (Fidelity Information Services), Northgate Capital avec les précédents fonds : Sequoia Capital (*), Siver Lake Kraftwerk et Autodesk Spark Investment Fund.

 

La technologie Carbon3D

 

La promesse de Carbon3D est fondée sur une technologie dont son fondateur Joseph DeSimone dit avoir eu l'idée en regardant la scène du T-1000 du film Terminator II où on voit un cyborg émerger en liquide métal. En mars 2015, lors d’une conférence TED à Vancouver, Carbon3D a présenté un prototype de machine CLIP permettant en théorie de multiplier par 25 à 100 la vitesse d'impression et d'améliorer la qualité des objets produits.

 

Les innovations de Carbon3D s'appuient sur l'utilisation de résine, de lumière et d'oxygène pour donner la technologie CLIP (continuous liquid interface production). Concrètement, la machine polymérise la matière en projetant des rayons UV dans un réservoir de résine à travers une fenêtre perméable à l'oxygène. Selon 3DVF.com, CLIP est une variante des techniques DLP/SLA : un projecteur vidéo projette une image sur une résine photosensible qui se solidifie. Un support se soulève lentement, et l'objet se forme petit à petit, collé au support. La partie inférieure du bac de résine est perméable à l'oxygène de l'air, qui réagit avec la résine de telle sorte que les trente premiers microns de résine restent liquide, et l’objet solide ne se forme que plus haut, en continu.

 

CLIP fonctionne ainsi en continu et non en "couche par couche" comme les autres techniques d'impression 3D. Elle pourrait créer des élastomères extrêmement souples, 25 fois plus rapidement qu’une impression Polyjet 3D et 100 fois plus vite qu’en stéréolithographie. avec une meilleure résolution et une structure plus proche des objets injectés.

 

L'état du marché

 

En 2014, selon un cabinet spécialisé (Wohlers), le marché de l'impression 3D se montait à

3,6 milliards € avec une croissance de 35 % par an. Le segment de l'impression 3D des métaux (20 % du marché) est celui qui croit le plus vite. Cinq grandes catégories de technologies se disputent ce segment : a) couches successives de poudre métallique agglomérées par un liant organique projeté par une rampe d'impression multijets puis frittage agglomèrant les grains métalliques (ExOne, VoxelJet, SLS de 3D Systems, Digital Metal de Fcubic/Höganäs), b) le procédé SLM : laser balayant la surface et fusionnant les grains métalliques (Concept Laser, EOS, Phenix Technologies de 3D Systems, Realizer, Renishaw, SLM Solutions, Prodway...), c) le procédé SLM : faisceau d'électrons fusionnant les grains métalliques (Arcam...), d) projection de poudre métallique au travers d'une buse concentrique à un faisceau laser qui la fusionne sur un substrat ou la couche précédente (Optomec, Trumpf, Beam...), e) le fabricant de matériels de soudage Sciaky propose des machines permettant de déposer un fil de titane qui est soudé sur la couche précédente. Le marché est en pleine évolution, les technologies étant encore largement aux stades de développement.

 

Carbon3D elle, se positionne pour l'instant sur le marché de l'impression des plastiques et élastomères. A l'évidence, vu les enjeux et le potentiel considérable, vu l'intérêt soulevé dans de nombreuses industries, les très nombreuses jeunes pousses qui se créent, lançant des défis majeurs aux leaders actuels du secteur, il faut s'attendre à de grands mouvements. Je suis prêt à parier que d'ici moins de 18 mois, d'autres acteurs annoncent des machines rapides et précises en concurrence frontale avec Carbon3D.

Les clefs sur un marché bouillonnant comme celui-ci sont bien sûr : la qualité de l'équipe, la capacité de mobiliser des fonds pour investir plus vite et plus fort que les autres et ne pas se tromper de technologie.

Cette course échevelée est passionnante. On peut penser que le marché devenant plus mature, des niches s'établiront, à côté des produits de masse, par exemple pour le grand public. Il y aura toujours de la place pour de nombreux acteurs.

 

(*) Sequoia qui était le seul investisseur dans WhatsApp, un service de messagerie sur téléphone mobile racheté par Facebook en 2014 pour un montant estimé à 19 milliards $, a aussi investi dans Stripe, Airbnb et Dropbox.

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