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27 février 2014 4 27 /02 /février /2014 22:21

Tranquillement et méthodiquement avec détermination, Carmat avance vers son but : développer, produire et commercialiser une prothèse du coeur fiable et autonome, qui puisse sauver les patients atteints d'insuffisance cardiaque avancée.

Le 18 décembre 2013, le premier coeur artificiel Carmat a été implanté sur un patient de 76 ans à l'hôpital Georges Pompidou, à Paris. Aux dernières nouvelles selon l'hôpital, le 19 février, soit 60 jours après l'opération, le patient est dans un état satisfaisant, s'alimente normalement et n'a plus besoin d'une assistance opératoire continue ; depuis le 10 janvier, il ne prend plus de traitement anticoagulant. "L'évolution a pu paraître longue et difficile mais a été, en bien des points, peu différente de celle d'un malade du même âge et de même gravité pré-opératoire", ajoute l'hôpital.

 

Jusqu'à présent, la seule solution pour ces patients était la greffe cardiaque. Selon Carmat, il y a une grande pénurie de greffons et seuls 5 à 7% des patients ayant besoin d'une transplantation peuvent bénéficier d'une greffe soit 4 000 patients dans le Monde. D'après la société, entre 100.000 et 120.000 malades pourraient potentiellement bénéficier de la technologie de Carmat en Amérique du Nord et en Europe, pour un marché mondial évalué à environ 16 milliards d'euros ; la commercialisation pourrait démarrer dans deux à cinq ans.

Le potentiel pour le coeur de Carmat serait donc immense.

 

15 ans de développement 

 

Depuis 1988, le professeur Alain Carpentier mène ses travaux, dépose des brevets et intéresse d'autres chercheurs en vue de réaliser une prothèse de coeur complète. En 1993, Jean-Luc Lagardère, fondateur et dirigeant de Matra, s'associe au projet dans le GIE Carmat et y apporte les ressources de ses équipes d'ingénieurs en aéronautique qui vont mettre en oeuvre tout un ensemble de technologies. De 1995 à 2008, une équipe de 12 personnes aux expertises complémentaires développe une succession de prototypes de plus en plus optimisés, plus légers, plus compacts et plus compatibles avec l'être humain, avec une régulation physiologique autonome. Tout est embarqué, il répond comme le coeur humain aux situations pathologiques. Son diagramme est reconnu par un cardiologue comme celui d'un coeur humain. Il est conçu pour battre 230 millions de fois soit environ 5 ans. 15 millions € sont investis au sein du laboratoire d’étude des greffes et prothèses cardiaques de l’Université Paris VI et à l’Hôpital Georges Pompidou.

 

La société Carmat est enfin créée en 2008, par les associés Matra Défense du groupe EADS – devenu Airbus, le professeur Carpentier et sa Fondation, le fonds Truffle Capital qui investit 5 millions € et le Centre chirurgical Marie Lannelongue. En 2009, Oseo fournit à Carmat une avance remboursable exceptionnelle de 33 millions €, autorisée par la Commission européenne.

Carmat est introduite avec succès en Bourse sur Alternext le 13 juillet 2010, au prix de 18,75 € par action. Le titre s'est envolé à l'introduction jusqu'à 22,10 €, la capitalisation atteignant 84 millions €. Cette introduction a permis de lever 16 millions € auprès d'institutionnels et de particuliers.

En juillet 2011, Carmat lance une augmentation de capital qui lui permet de lever 29,3 millions € afin de poursuivre les essais cliniques, d'accélérer le développement des parties externes de la prothèse, notamment des piles à combustible en remplacement des lithium-ion initiales (5h d'autonomie) et de mettre en place l'outil industriel.

 

Des partenariats sont noués avec

  • Edwards Lifesciences, leader mondial des valves cardiaques biologiques,

  • Paxitech, société issue du CEA, pour réaliser une pile à combustible portée qui ne présentera pas les problèmes de stockage de l’hydrogène, procurera une autonomie de 12h et ne pèsera que 3kg,

  • Amesys, filiale du groupe Bull, pour réaliser un équipement portable qui permettra au patient une mobilité satisfaisante dans sa vie de tous les jours

 

Les perspectives d'avenir

Avec le succès de la première implantation, deux phases successives d'essais cliniques sont prévues avec d'abord 3 nouveaux patients avec pour critère la survie à 30 jours, puis une vingtaine de patients. L'objectif est le marquage CE qui ouvrirait la voie à la commercialisation.

 

Carmat a déjà annoncé que son coeur serait vendu 150 000 €. A cela s'ajoute le coût de l'implantation d'environ 260 000 € (comme pour une transplantation) et du suivi. Mais il y aurait grâce à l'absence d'un traitement anti-rejet, une économie de 20 000 € par an par rapport à la greffe du coeur. Cependant, à ce niveau de prix, seul un nombre limité de pays pourra se permettre de mettre en oeuvre l'implantation du coeur Carmat.

Ce qu'on peut espérer, c'est que l'industrialisation, la miniaturisation et la baisse des coûts des technologies utilisées permettront de réduire rapidement le coût de la prothèse. Carmat est actuellement très discrète sur ce type de perspective. L'évocation d'un marché potentiel de 16 milliards € lors de l'introduction en Bourse, est une peu surréaliste (150 000 € x 106 000 patients) car on ne voit pas qui pourrait financer (patient ou système d'assurance maladie) un tel montant pour un nombre finalement limité de patients. D'autres évaluations de marché ont été évoquées : 3 milliards € et même 500 millions € si le coeur Carmat est seulement réservé aux malades en attente de transplantation.

 

Actuellement, Carmat " brûle " environ 20 millions € par an, sans aucun revenu autre que les subventions de la BPI et le crédit impôt recherche. Fin 2013, il y avait une trésorerie de 16,9 M€.

On voit donc que Carmat doit chaque année rechercher de nouveaux financements importants, avec une perspective de commercialisation à un horizon incertain : 2015, 2016, … ? On voit là un point faible majeur du financement des jeunes pouces en France : la force de frappe limitée des investisseurs, fonds d'investissement ou particuliers.

Le fait que la BPI, Oseo et autres acteurs étatiques s'impliquent de plus, avec des moyens insuffisants, ne favorise pas l'arrivée d'investisseurs étrangers, notamment américains.

On a nettement l'impression que l'on reste entre soi. En 2013, des accords de coopération clinique ont été conclus avec quatre centres de chirurgie cardiaque de renom en Belgique, en Pologne, en Slovénie et en Arabie Saoudite. Pas trace d'accord avec les Etats-Unis qui pourtant auraient certainement des moyens considérables pour lancer la commercialisation.

 

De nombreux actionnaires individuels – ils détiennent 28% du capital, font confiance à Carmat. Je leur souhaite de ne pas être déçus à terme.

Pour l'instant, ceux qui ont souscrit lors de l'introduction en Bourse ont vu leur investissement multiplié par 6, le cours de Carmat oscillant actuellement entre 100 et 130 €. On peut se demander combien de temps Airbus va t'elle accompagner Carmat ? Quelle solution envisager pour assurer l'avenir de l'entreprise ? Peut-être qu'un investisseur d'un pays du Golfe va survenir et jouer le chevalier blanc.

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31 janvier 2014 5 31 /01 /janvier /2014 22:44

Le commerce électronique est en pleine croissance et devient adulte ! Cela ne surprendra personne. Qu'en est-il réellement ? …

 

Un « bain de sang » à prévoir

 

Les ventes sur Internet ont atteint 51 milliards € en France en 2013, en progression de 13% sur les ventes 2012 d'un montant de 45 milliards € selon la FEVAD (Fédération de la vente à distance) ; cela correspond à 2,5% du produit intérieur brut français (2,2% du PIB en 2012), il y a donc une large marge de progression ! Depuis 2005, les ventes sur Internet ont été multipliées par 6 et le nombre de sites marchands par 10 à 138 000. En un an, 20 000 nouveaux sites marchands ont été créés.

Les ventes progressant presque deux fois moins vite que le nombre de sites, on peut s'attendre à un « bain de sang », à la disparition de nombreux sites dans les très proches années, parce qu'ils n'arrivent pas à se faire une place au soleil. On constate d'ailleurs qu'il y a souvent une prime au premier entrant et que, dans un segment donné, il est difficile de tenir tête au numéro 1, de garder le contact dans la course à la croissance du segment.

Je recommanderai donc à tous ceux qui souhaitent se lancer, de viser un segment de marché où il n'y a pas encore d'acteur ou tout au moins, si il y en a déjà, d'aborder le segment avec un avantage compétitif très substantiel. Aux investisseurs prêts à les accompagner de valider avec soin cet avantage !

Je note au passage que certains indices de la FEVAD n'incluent pas un acteur majeur : Amazon, qui se garde donc bien de dévoiler ses progrès sur le marché français. Ceci retire une grande part de crédibilité à ces indices, notamment son indice ICE40 censé représenter le marché. Ainsi cet indice a progressé de 7% en 2012, et de 4% en 2013 bien moins vite que le marché ! Peut-être cette faible croissance indique-t'elle que l'essentiel de la croissance de l'ensemble des ventes sur Internet vient en fait des nouveaux entrants, les ventes des "poids lourds" qui font l'indice étant stagnantes. Cela rendrait le bain de sang plus incertain.

 

Le Royaume-Uni en tête ! ?

 

En Europe, selon l'association Ecommerce Europe, le Royaume-Uni réalise environ 35% des ventes européennes sur Internet (96 milliards € sur un total de 276 milliards € en 2012) avec seulement 14% du produit intérieur brut de l'Union : il aurait donc une avance considérable sur les autres pays avec un ratio de 5,3% du PIB. L'Allemagne est très proche de la France, avec des ventes de 50 milliards € en 2012. Globalement, ces trois pays réalisent 70% des ventes Internet de l'UE alors que leur produit intérieur brut se monte à 50% du total.

On peut s'interroger sur l'avance prise par le Royaume Uni : la communauté de langue avec les Etats Unis doit jouer un rôle majeur, elle permet en effet aux sites marchands américains d'être très rapidement opérationnels. De nombreux e-commerçants marchant sur les traces de sociétés de vente par correspondance américaines (Sears, Land's End, ...), se sont implantés très tôt outre Manche. Ce n'est surement pas suffisant et lorsqu'on compare ces chiffres à la pénétration du commerce électronique en Amérique du Nord et dans les autres pays d'Europe, on est tenté de mettre en doute les statistiques du Royaume-Uni notamment sur l'uniformité d'un pays à l'autre des méthodes de comptabilisation des ventes sur Internet.

En effet les autres pays d'Europe de l'ouest que cela soit la Suisse, l'Autriche, le Benelux ou les pays nordiques présentent des pourcentages similaires à la France et l'Allemagne : entre 1,7 et 2,4% du PIB.

Et l'ensemble de l'Europe y compris les pays non membres de l'UE et la Russie a réalisé 312 milliards € en 2012, à comparer à 294 milliards € pour les Etats Unis plus Canada. Ce chiffre de 294 milliards correspond à 2,3% du PIB combiné des Etats-Unis et du Canada, soit un pourcentage plus de 2 fois moindre à celui du Royaume Uni.

Le Royaume-Uni aurait ainsi quelque 3 ou 4 ans d'avance dans le développement des ventes sur Internet sur les autres grands pays.

 

La répartition des ventes d'Amazon

 

Amazon est un acteur dominant du commerce électronique aux Etats Unis comme en Europe ; Mediamétrie qui suit le trafic sur les sites marchands, la place en tête en France avec 16,5 millions de visiteurs uniques par mois fin 2013, devant la FNAC, Cdiscount, eBay et Price Minister (respectivement 10,4 10,1 9,2 et 7,8 millions).

Mais ce qui permet mieux de mettre les choses en perspective, est de relever les chiffres de ventes par pays, donnés par Amazon dans ses rapports financiers et la part de marché qui en résulte en 2012 (les chiffres de marché pour 2013 ne sont pas encore connus) :

 

Milliards € (taux moyen $1,35 par €)

Ventes 2013

Ventes

2012

Part marché

2012

Ventes

2011

Ventes 2010

Croissance 2010- 2013

Amérique du Nord

33

25,8

8,8%

19,8

13,9

x 2,4

Allemagne

7,8

6,5

13%

5,4

3,9

x 2

Japon

5,7

5,8

 

4,9

3,7

x 1,5

Royaume Uni

5,4

4,8

5%

4

2,9

x1,9

Total hors Amérique du Nord

22,2

19,5

4,4%

15,8

11,5

x1,9

Total mondial

55,2

45,3

5,1%

35,6

25,3

x2,2

% ventes hors Amérique du Nord

40,2%

43%

 

44,4%

 

45,4%

 

 

Les chiffres d'Amazon, société cotée en Bourse, étant considérés comme fiables, on constate en 3 ans, de 2010 à 2013, une progression remarquable en Allemagne avec un doublement des ventes, au Royaume-Uni x 1,9 et aux Etats-Unis avec des ventes multipliées par 2,4. La progression est bien moindre au Japon, où Rakuten est un leader très bien implanté.

La comparaison des chiffres d'Amazon pour l'Allemagne et le Royaume-Uni confirment le scepticisme exprimé plus haut sur les chiffres de marché du Royaume-Uni.

 

Le développement des places de marché

 

Avec le ralentissement de la croissance en Europe en 2013, et notamment en France, les principaux acteurs font feu de tous bois et développent le concept de place de marché : ils offrent de plus en plus leur plate-forme Internet à d'autres commerçants qui y installent leur boutique et bénéficient de leur infrastructure. Ce concept a été inventé il y a longtemps par eBay et de nombreux ont suivi.

Cela peut paraître intéressant aux commerçants qui pensent pouvoir profiter de la croissance des ventes sur Internet mais il apparaît que cela bénéficie surtout à la place de marché qui élargit son offre, développe plus vite sa notoriété et bloque ainsi mieux les nouveaux entrants.

Il est certain qu'on peut comparer le commerce électronique au commerce physique : là où le commerçant maîtrise ses canaux de distribution, il aura un meilleur contrôle sur sa stratégie de développement ; faire reposer son développement des ventes sur Internet sur l'usage des places de marché, risque fort d'en limiter le potentiel, en particulier parce que les places de marché proposeront des commerçants concurrents.

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31 janvier 2014 5 31 /01 /janvier /2014 22:42

Une sorte de frénésie semble atteindre les media sur ce thème, de nombreuses jeunes pousses se lancent sur un marché qui pourrait être un nouvel eldorado et des grands groupes comme Schneider Electric ou Toshiba essayent de garder le contact : le marché des objets connectês, appelé aussi l'Internet des objets, serait en plein boom !

On est probablement encore face à un marché en émergence, un marché où les clients sont plutôt des adoptants précoces (« early adopters » en jargon marketing), des clients qui sont prêts à tester les nouveaux objets teintés d'innovations sans nécessairement s'interroger sur la vraie valeur de ces innovations. Ces adoptants précoces sont généralement peu nombreux ; et les entreprises qui ont l'ambition de croître rapidement au-delà de cette frange initiale de clients, se doivent de séduire le coeur de la clientèle cible ; ce coeur de cible sera beaucoup plus exigeant sur la vrai valeur des objets comme sur leur fiabilité et sur la qualité des services associés.

 

Les bases des objets connectés

 

Cependant, depuis une dizaine d'années, il est certain que le phénomène d'adoption des nouveaux objets technologiques par le plus grand nombre, se propage plus vite que par le passé.

Apple a joué un grand rôle en provoquant notamment le décollage du marché des « smartphones » puis celui des tablettes. La facilité d'utilisation de ses produits, l'éco système qu'Apple a créé avec l'App Store en juillet 2008 et avec ses boutiques exclusives, ses techniques de communication faisant appel à de nouveaux moyens comme le buzz sur les réseaux sociaux, le soutien des opérateurs téléphoniques ont entraîné ce décollage. Malgré le prix élevé des produits Apple, la sensation de valeur procurée par la multitude d'applications gratuites ou peu coûteuses, a entraîné l'adoption très rapide de ses smartphones. La plate forme Android de Google a permis à d'autres acteurs de se faire une place, de rendre le marché encore plus légitime et de l'élargir en offrant des smartphones moins chers.

 

C'est principalement sur ces bases favorables que le marché des objets connectés est en train de décoller. Ces objets ont en commun d'avoir une liaison sans fil via Internet ou bluetooth avec un équipement « intelligent », un smartphone, une tablette ou un ordinateur ; l'équipement intelligent sera accompagné d'un logiciel spécifique permettant de collecter les données, de les stocker et de fournir une analyse. Ce logiciel spécifique est téléchargeable sur les App Stores Apple, Android, etc.

Les éléments sont en place : la plate-forme de contrôle et d'analyse – le smartphone, la tablette ou l'ordinateur, est entre les mains des clients potentiels qui sont déjà à l'aise avec son usage ; les plate-formes de distribution des logiciels qui apportent la vrai valeur des objets connectés – les App Store, sont bien rodées et connues tant par les développeurs que par les clients.

 

Les capteurs

 

En parallèle, des progrès fantastiques ont été réalisés avec un élément clef du fonctionnement des objets connectés : les capteurs. Miniaturisés, moins coûteux, moins gourmands en énergie, capables de mesurer de nouveaux paramètres, les capteurs ont d'abord pénétré les automobiles depuis une vingtaine d'années. Le marché automobile est un marché très exigeant en coût et en performance et qui génère de grands volumes de production ; il a en quelque sorte préparé la mise à disposition pour les objets connectés de capteurs adaptés, abordables pour le grand public. De grandes sociétés comme ST Micro se sont positionnées avec succès sur ce créneau.

 

La taille du marché ?

 

Selon une étude du suisse Intechno Consulting, en 2016, le marché civil des capteurs dépasserait les 180 milliards €, se partageant entre les technologies de l'information et de la communication (22,9%), les transports (22,8%), le bâtiment (18,1%) et les machines industrielles (9,7%). Selon d'autres études, le nombre d'objets connectés en 2020 se situerait entre 18 milliards et 212 milliards !

D'après la société d'études GFK, le marché français des objets connectés a été de 300 000 unités en 2013 et de 64 millions € ; en 2014, il passerait à 150 millions € et 400 millions € en 2015.

Ces projections bien sympathiques, sont certainement à prendre avec précaution, surtout quand on a un projet d'entreprise et que l'on prépare une présentation à des investisseurs.

Ce que doivent prendre en compte les jeunes entrepreneurs, c'est le coût relativement faible d'entrée sur ce marché grâce aux plate-formes en place et aux capteurs toujours plus performants à moindre coût. Ce qui est valable pour soi, l'est aussi pour tous les concurrents.

Deux marchés sortent du lot actuellement : la santé mobile et la domotique.

 

Un marché en plein essor : la santé mobile

 

La santé mobile se développe rapidement car elle n'est pas soumise aux contraintes des produits médicaux, comme la nécessaire validation clinique. Cette dernière est très coûteuse et prend du temps ; c'est difficilement compatible avec les ressources limitées des jeunes pousses et le rythme rapide d'innovation et de sortie de nouveaux objets connectés. Tant que l'objet connecté ne sert pas à la prise de décision médicale, et que les données sont traitées pour le client et non pour un professionnel de la santé, il reste du domaine des acteurs non spécialistes du médical.

 

Sur ce marché, on trouve notamment :

Withings : balance, tensiomètre, moniteur de nourrisson, Aura (suivi du sommeil)

Netatmo : mesure de l'exposition aux UV et indication de la crème solaire à utiliser

FitBit, FuelBand (Nike), Smartband (Sony), Lifeband Touch (LG) : bracelets surveillant l'activité physique

Kolibree : bon usage de la brosse à dent

 

En parallèle, on voit apparaître des dispositifs médicaux connectés comme le Diabeo de Sanofi ou la montre connectée de l'Israélien Oxitone. Le Diabeo permet à un diabétique de calculer la dose d'insuline qu'il doit administrer. La montre d'Oxitone mesure en permanence les pulsations cardiaques et le taux d'oxygène dans le sang pour des patients souffrant d'insuffisance respiratoire.

 

Un marché en émergence : la domotique

 

Dans le domaine de la domotique, la cible est principalement l'optimisation de la consommation d'énergie.

Face à des « box » propriétaires proposées par Bouygues, Legrand ou Castorama, apparaissent des objets connectés. Le plus remarquable est Nest Labs qui vient d'être racheté par Google pour 3,2 milliards $. Il s'agit d'un thermostat intelligent qui analyse les habitudes de consommation et en déduit la conduite du chauffage ; il transmet sur smartphone les relevés et alertes. Schneider Electric vient de lancer le Wiser qui propose aussi un thermostat intelligent couplé à une application pour smartphone, tablette ou PC.

La domotique est surement un domaine plus complexe que la santé mobile. Ce marché est en train d'émerger et devrait intéresser des entrepreneurs audacieux et créatifs.

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19 janvier 2014 7 19 /01 /janvier /2014 22:01

Depuis 2009, un palmarès de la relation client des entreprises françaises publié par l'agence HCG, décerne des notes aux principales d'entre elles. On remarque des constantes qui évoluent peu et ne sont guère surprenantes : en bas du tableau, on trouve régulièrement les opérateurs télécoms comme Iliad (Free), Bouygues Télécom, Numéricable, Orange et les voyagistes positionnés sur les prix les plus bas (Nouvelles Fontières, Fram) mais aussi Air France, et en haut du tableau, les acteurs de l'alimentaire, du bricolage, du service automobile, des cosmétiques et du luxe : Clarins, Fauchon, Yves Rocher, Leroy Merlin, Castorama, Norauto, Speedy. Pour 2014, les cinq premiers sont BMW, Nestlé, Toyota, Kronenbourg et Castorama.

 

Les variations d'une année à l'autre peuvent être très importantes : c'est ainsi qu'entre 2013 et 2014, PSA passe de la 10ème à la 97ème place avec un score de 13,12/20 au lieu de 16,77/20 et Truffaut de la 9ème à la 52ème place avec un score de 14,21/20 au lieu de 16,85/20. Il semble que les réorganisations, les changements dans les équipes, ont une impact très rapide sur la qualité du service en relation directe avec les clients. A l'opposé de PSA, BMW et Mercédès auraient poursuivi une stratégie globale de la relation client qui s'est traduite par une amélioration sensible de leur score.

Naturellement, lorsque la situation d'une entreprise n'est pas bonne et qu'il s'agit de comprimer les coûts, on peut être tenté de réduire les équipes en nombre, en expérience et en compétence, surtout au niveau de l'accueil téléphonique et de la réponse aux courriers et courriels.

Ce sont des activités coûteuses en personnel et l'impact sur le chiffre d'affaires est à coup sûr quasiment invisible à court terme : les clients qui réclament sont une minorité, ont probablement acheté récemment et n'auraient pas acheté à nouveau avant un certain temps ; c'est par exemple le cas chez les constructeurs automobiles. Mais il s'agit d'un jeu dangereux à moyen/long terme, car, comme chacun sait, les clients insatisfaits parlent beaucoup plus autour d'eux de leurs mauvaises expériences, que les clients satisfaits de leurs bonnes. Une réputation se détruit plus vite qu'elle ne se construit.

 

Les canaux de la relation client

 

Les éléments de l'évaluation de la relation client comprennent selon HCG : 1) l'accueil de l'entreprise – le standard téléphonique, les sites Internet et les pages Facebook, et 2) le service clients / consommateurs – l'accueil téléphonique du service, la réponse aux courriers et aux courriels. L'accueil des sites Internet est généralement excellent et 86% des entreprises répondent aux commentaires postés sur leurs pages Facebook. Le service clients et consommateurs est bien moins traité avec une moyenne de 12,4/20 pour le téléphone, 9,2 pour le courrier et 9,9 pour le courriel.

 

On comprend que les entreprises soient très attentives aux risques liés aux rumeurs sur les réseaux et à leur puissant effet de résonance. Mais n'ont-elles pas tort de délaisser les autres canaux ? Selon les circonstances, les mêmes clients peuvent utiliser les 2 types de canaux. De plus, toute une partie de la clientèle, notamment les seniors, s'adressera très majoritairement aux services clients / consommateurs. Ce n'est certainement pas une clientèle à négliger compte tenu de son pouvoir d'achat et de son nombre toujours croissant.

 

Les clients sont de plus en plus « volatiles »

 

Selon une récente étude d'Accenture, les consommateurs changent de plus en plus souvent de fournisseurs à cause d'un mauvais service. Il s'agit bien sûr d'abord des distributeurs grand public, mais aussi des banques, des opérateurs de télécommunication, des fournisseurs d'énergie, … On peut penser que les consommateurs sont de plus en plus exigeants, en effet l'Internet et les réseaux sociaux donnent accès à plus d'information sur les tarifs et les produits des différents acteurs, et sur les problèmes rencontrés par d'autres clients. Via Internet, la résiliation d'un ancien contrat ou la signature d'un nouveau est aussi plus aisée.

Il est certain que les entreprises sont pour la plupart conscientes de cette situation. Mais conduisent-elles les bonnes stratégies pour fidéliser leur clientèle ? On peut en douter pour certains secteurs, comme les banques en France.

 

En France, la satisfaction client ?

 

Via une index international des valeurs corporate, l'agence Wellcom observe les valeurs qui dominent dans la communication et la culture des entreprises dans 13 pays. Dans le dernier index publié début 2013, seules 17% des entreprises françaises plaçaient la satisfaction client parmi leurs valeurs. Parmi les 13 pays, la satisfaction client progresse de 26 à 28% par rapport à 2012 ; par contre en France, elle régresse de 22 à 17% : c'est particulièrement inquiétant à une époque où la concurrence internationale est de plus en plus vigoureuse ; la France a perdu des parts de marché et les acteurs de tous horizons s'affairent pour qu'une certaine reconquête se produise.

 

En France, les valeurs les plus fréquemment citées sont les suivantes (entre parenthèses, le rang international sur les 13 pays de l'étude)

1-Innovation 27% (1er sur les 13 pays)

2-Respect 23% (9ème)

3-Intégrité 23% (4ème)

4-Esprit d’équipe 22% (8ème)

5-Satisfaction client 17% (3ème)

6-Qualité 17% (2ème)

7-Responsabilité 16% (7ème)

8-Partage 15% (41ème)

9-Performance 14% (13ème)

10-Confiance 12% (11ème)

 

On voit clairement que les points faibles souvent mentionnées par les clients étrangers : qualité et satisfaction client, ne font pas partie des priorités les plus hautes de nombre d'entreprises françaises et pour la plupart d'entre elles, elles ne figurent même pas car le nombre des valeurs citées est souvent au maximum de 4.

N'est-ce pas là que devrait être porté l'effort des différents acteurs qui cherchent à développer leurs ventes et leur présence à l'international et redresser leur compétitivité ? Il s'agit d'un changement dans la culture et la communication des entreprises, qui doit ensuite se concrétiser en interne par la mise en place de processus nouveaux.

A titre de comparaison, la satisfaction client est placée en tête des valeurs d'entreprise en Finlande et en Norvège. Elle occupe le 2ème rang aux Pays-Bas et le 3ème rang en Autriche, en Allemagne, en Italie, en Pologne, en Espagne, au Royaume-Uni et aux États-Unis. 

Manifestement, une sorte de révolution doit être entreprise en France sur ce thème !

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28 décembre 2013 6 28 /12 /décembre /2013 23:43

Mes lecteurs me pardonneront, je l'espère, cette nouvelle histoire d'une étoile filante du logiciel français qui disparaît du paysage. Apparue pour la première fois au classement Truffle des éditeurs français de logiciel en 2011 à la 38ème place, Neolane prend les 22 et 20ème places en 2012 et 2013, mais ne sera pas présente au classement 2014. Elle a été rachetée en juin 2013 par Adobe pour la somme rondelette de 600 millions $ en cash, alors que son chiffre d'affaires 2012 n'a été que de 44 millions €, en croissance tout de même de 44% par rapport à 2011.

 

Je note au passage que, contrairement à ce qui s'est passé au début de l'année pour DailyMotion, nos politiques alors très actifs pour défendre l'indépendance des étoiles numériques françaises, n'ont absolument pas bronché lors de ce rachat éclair. Etaient-ils déjà partis en vacances ?

 

Et pourtant, on doit considérer Neolane comme un acteur bien plus stratégique que Daily Motion. Daily Motion n'est en effet qu'un acteur mineur de la diffusion de videos sur Internet, étant positionné au 12ème rang mondial des plate-formes de video en ligne, est de taille similaire à Neolane avec des ventes de 40 millions € en 2012 et 160 employés. Lors du rachat par Orange de l'ensemble du capital en janvier 2013, elle était valorisée à 300 millions €, soit la moitié de Néolane !

Dans le même temps, la société de conseil et d'étude Gartner, guru des nouvelles technologies, a jugé en juin 2013, Neolane comme un acteur “visionnaire” du marketing numérique dont les « budgets augmentent deux fois plus vite que les budgets de marketing global et représentent maintenant environ un quart du total des dépenses marketing.» En effet Neolane permet à ses clients – des grands comptes comme Carrefour ou Samsung, Sony Music ou Starbucks, de modéliser, d'évaluer et d'orchestrer leurs actions de communication et de marketing sur Internet, sur les réseaux sociaux, les mobiles et au téléphone. Adobe l'a bien compris qui a payé le prix fort pour un leader alors qu'Orange a très certainement surpayé Daily Motion, qui ne sera jamais un leader si il reste seul, sans Yahoo ou un autre.

 

Neolane a été fondée en 2001 par trois Centraliens : Stéphane Dehoche, Stéphane Dietrich et Thomas Boudalier qui avaient déjà à leur actif la création d'AGDS à leur sortie de l'ECP en 1991, vendue à Apsylog en 1996, elle-même rachetée par Peregrine Systems. Leur première offre Neolane version 1, permet aux entreprises de gérer leurs campagnes e-mails et SMS. En pleine crise de l'Internet, début 2002, le fonds d'investissement Auriga Partners, fait confiance à l'équipe et investit 2 millions €. La plate forme de Néolane se développe et permet d'agréger les informations provenant de campagnes marketing multicanal. Se succèdent les ouvertures de bureau à Londres en 2005, Copenhague en 2006 et Boston en 2008, facilitées par une nouvelle levée de fonds de 5 millions € en 2006, avec Auriga et Xange. La filiale américaine profite de la crise pour recruter plus de 30 talents en deux ans, qui n'auraient peut-être pas rejoint une entreprise française en temps normal.

En janvier 2012, Neolane lève 27 millions $ aux Etats-Unis, principalement auprès de Battery Ventures, afin d'accélérer son développement sur le marché américain.

Le chiffre d'affaires progresse de 22 millions € en 2010, à 31 millions € en 2011 et 44 millions € en 2012 avec plus de 300 employés dont 60 aux Etats-Unis.

 

Depuis plusieurs mois, le secteur de l' « e-marketing » était en pleine ébullition avec le rachat d'Exact Target par Salesforce.com, celui d'Unica par IBM, d'Aprimo par Teradata. Ce qui a sans doute poussé Adobe à sortir du bois. Je suspecte qu'Auriga a été très heureux de toucher 33 fois sa mise de 2002, comme cela a été diffusé dans la presse, et les fondateurs ont du être mis sous pression pour accepter l'offre d'Adobe. Manifestement leur stratégie était jusqu'alors, celle d'un développement international bien équilibré, similaire à celle que Criteo a poursuivie. La différence et c'est regrettable, à mon sens, est que Neolane n'a pas été jusqu'à l'introduction en Bourse.

Et maintenant, nos trois mousquetaires entrepreneurs en série associés à Benoît Gaudron, que vont-ils faire ? Repartir à l'attaque avec un nouveau projet ? A suivre !

 

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27 décembre 2013 5 27 /12 /décembre /2013 22:45

La reprise d'entreprise est un chemin compliqué, semé d'embûches. Les nombreuses formations, documentations et recommandations en tous genres proposées aux candidats, sont focalisées sur la phase d'avant-reprise. En fait, cette phase comporte peu de risques, en particulier financiers, dans la mesure où le repreneur ne s'est pas engagé de manière définitive et n'a pas encore mobilisé tous les fonds dont il dispose. Son risque financier est limité à ce qu'il dépense auprès des conseils avec qui il contracte en vue de sa chère reprise : avocat, expert-comptable, mandataire achat.

 

Afin de réduire encore ce risque, tout repreneur sera bien avisé de ne contracter avec un avocat et un expert-comptable que lorsqu'il sera très avancé dans une négociation, c'est-à-dire après la co-signature d'une lettre d'intention, entre le cédant et lui-même, ce qui équivaut à une promesse de vente dans l'immobilier.

Avec un peu d'expérience et l'aide d'autres repreneurs, il sera à même de rédiger une lettre d'intention tout à fait acceptable sans le secours d'un juriste. Et il serait bien inquiétant qu'il ne puisse examiner par lui-même, sans l'aide d'un expert-comptable, les comptes des entreprises qui l'intéressent ; si c'est le cas, il devrait bien vite suivre une formation accélérée à la comptabilité et à l'évaluation d'entreprises, avant d'aller plus avant dans son projet de reprise.

 

D'expérience, un mandataire achat n'est vraiment utile que lorsque l'on cherche à négocier directement avec des dirigeants susceptibles de vendre mais qui n'ont pas eux-mêmes mandaté de conseil pour la vente. En effet, il est toujours aventureux de négocier sans intermédiaire avec un cédant, une question anodine posée directement pouvant aboutir sans que l'on n'y prenne garde, à la rupture des discussions.

 

L'après-reprise est véritablement beaucoup plus compliquée et plus risquée : le repreneur se retrouve soudainement à la tête d'une entreprise qu'il connait peu, d'une équipe qu'il n'a généralement pas rencontrée et qu'il n'a certainement pas choisie, avec des clients et des fournisseurs quasiment inconnus. L'essentiel des informations dont il dispose, lui a été fourni par le cédant, qui a sa vision personnelle des choses, une culture souvent très différente de celle du repreneur et une vue probablement incompatible de ce qui est important et ne l'est pas. Naturellement, il est généralement prévu une période d'accompagnement mais celle-ci est souvent écourtée, la présence du cédant s'avérant encombrante pour le repreneur. Il s'aperçoit aussi rapidement que l'aide apportée par le cédant est très limitée. Et une fois la cession effectuée, le cédant aura l'esprit ailleurs, vers ses futures nouvelles activités.

 

Une grande attention devra être portée par le repreneur sur quatre points essentiels : l'équipe d'encadrement, les clients importants, les fournisseurs importants, les commandes et marchés en portefeuille.

 

- l'équipe d'encadrement : elle a souvent eu l'ambition à un moment donné de reprendre l'entreprise. Cette ambition a été déçue puisque c'est vous qui avez réussi à convaincre le cédant de vous vendre son affaire. Soit le cédant a considéré que l'équipe n'était pas qualifiée soit elle manquait de moyens financiers pour convaincre les banques et/ou d'autres investisseurs de les accompagner. Quelle que soit le motif de cet échec, le repreneur risque d'être vu comme un intrus les ayant empêché de réaliser leur ambition.

Ce qu'il importe au repreneur d'accomplir rapidement sera de remporter l'adhésion de l'équipe à la vision et au projet d'entreprise ; le projet pourra évoluer dans les premiers mois en fonction d'éléments nouveaux comme des projets en cours non dévoilés lors des pourparlers. Mais il faudra souvent admettre qu'il est nécessaire de se séparer de certains membres de l'équipe qui n'adhèrent pas au projet.

 

- les clients importants : ceux avec qui l'entreprise réalise plus de 5% de son chiffre d'affaires ; il faut vite les rencontrer pour établir une nouvelle relation personnelle, pour évaluer la qualité de leurs rapports avec l'entreprise notamment sur les délais de livraison, leur perception des services et des produits, leurs prévisions à court et moyen terme et leur situation financière.

Il sera sage d'éviter tout dossier dans lequel la dépendance d'un seul client dépassera le quart du chiffre d'affaires ; même si la législation est supposée protéger contre les ruptures brutales des relations commerciales : elle n'empêche pas les ruptures de se produire, elle permet seulement d'être éventuellement indemnisé après de longs mois de procédure.

 

- les fournisseurs importants : peu souvent cités, au contraire des clients, les fournisseurs sont, à mon sens, potentiellement plus critiques et même dangereux que les clients. Imaginons une société de négoce et d'importation qui perdrait une ou deux représentations significatives, ou encore une entreprise industrielle dépendant d'un fournisseur unique pour un composant clef de sa fabrication, qui se retrouverait face à une rupture d'approvisionnement ; comment cela peut-il arriver : que le fournisseur clef soit en difficultés financières, ou qu'il ait des problèmes de qualité ou encore qu'il ait des doutes sur la pérennité des relations avec l'entreprise qui vient d'être reprise ?

 

- les commandes et marchés en portefeuille : cela peut constituer une pilule empoisonnée. Supposons que le cédant ait pris des marchés à prix cassé, juste avant la cession afin de rendre la « mariée » plus belle. Une autre situation que j'ai connue, est celle d'une entreprise qui comptabilise à l'avancement la construction de systèmes qui se déroule sur plus d'un exercice : qu'avant la cession, l'affectation des coûts et charges soit inférieure à la réalité par rapport à la part de la construction effectivement réalisée, le profit avant la cession sera alors surévalué ; après la cession, le repreneur se retrouvera avec des coûts et charges supérieurs à la valeur restante de la construction, faisant face à une perte.

 

De nombreux repreneurs témoigneront avec moi que la prise en main de l'entreprise nécessitera souvent un an, peut-être plus, la première année étant alors une année perdue pour tout développement ; finalement, si elle survit à ces écueils et à d'autres, l'entreprise rachetée sera vraiment en ordre de marche seulement après cette période d'adaptation.

 

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25 décembre 2013 3 25 /12 /décembre /2013 21:22

Depuis 15 ans, l'industrie pharmaceutique se transforme en France : peu à peu, les grands groupes pharmaceutiques cèdent leurs usines à de nouveaux acteurs spécialisés dans la production, des sous-traitants que l'on appelle des façonniers. Selon une étude de Xerfi, le marché français du façonnage a été multiplié par six en 15 ans.

Les groupes pharmaceutiques soutiennent officiellement que la production n'est pas pour eux un domaine stratégique et qu'ils préfèrent se concentrer sur la recherche, le développement et le marketing de leurs produits ; en réalité, ils orientent aussi de plus en plus leur production vers les pays émergents et leurs efforts de développement vers les vaccins et la bio-production et, phénomène moins reconnu, ils abandonnent les investissements de production en France alors qu'ils continuent à investir dans les autres pays d'Europe.

 

Les groupes pharmaceutiques sont certes confrontés à la concurrence toujours plus forte des génériques pour leurs produits matures, d'où une baisse de volume de production sur de nombreux sites. En parallèle, l'efficacité de leur recherche et développement tend à diminuer ; toujours plus d'investissements sont nécessaires sans que cela se concrétise par la sortie d'un nombre croissant de nouveaux médicaments vraiment innovants, des « blockbusters », avec un potentiel de vente de plusieurs milliards d'euros. Selon une étude récente de Deloitte et Thomson Reuters sur l'innovation pharmaceutique, les grands laboratoires projettent un taux de retour d'investissement en baisse pour leurs produits en développement ; ce taux aurait été réduit de 10,5% en 2010 à 4,8% en 2013. On constate ainsi un effet de ciseau entre potentiel de chiffre d'affaires en baisse et coûts de développement en hausse.

 

Fareva, leader des façonniers

 

Face à des groupes pharmaceutiques qui s'efforcent de préserver leur avenir par de multiples moyens, notamment en réduisant leurs investissements en production, les façonniers ont pris une place majeure, en reprenant aux groupes leurs sites industriels en difficulté. Le leader en France est Fareva, un groupe détenu par Bernard Fraisse qui l'a fondé à 28 ans en 1985 avec son frére Jean-Pierre, à St Félicien en pleine campagne ardèchoise, non loin d'Annonay et de Tournon. Depuis ses débuts, la société s'est focalisée sur la formulation, la fabrication et le conditionnement pour le compte d'autres groupes, d'abord dans les produits ménagers industriels, puis dans les cosmétiques à partir de 1995, les produits pharmaceutiques à partir de 2002 et enfin alimentaires à partir de 2008. Fareva est présente dans 10 pays avec 31 sites, en France, Allemagne, Royaume-Uni, Suisse, Ukraine, Russie, Turquie, Italie, Brésil et aux Etats-Unis ; son chiffre d'affaires qui est passé de 8,4 millions € en 1991 à 100 millions € en 2000, a atteint 1,075 milliards € en 2012 avec 7 500 employés, l'activité pharmaceutique représentant près de 50% du total.

L'avantage principal du façonnier est de pouvoir faire travailler un même site industriel pour plusieurs clients, avec l'engagement initial du cédant de lui confier la sous-traitance des produits déjà traités par le site.

Mais en plus, Fareva, tout en sachant démarcher d'autres clients pour ses capacités de production, investit chaque année 45 millions € en équipement et développe de nouveaux conditionnements dans ses laboratoires de R&D.

 

Les façonniers au service des start-ups

 

La capacité de production et de conditionnement des façonniers se met également au service des start-ups ; cela permet à ces dernières de se concentrer sur le développement de leur produit et, en cas de succès, de pouvoir démarrer la production sans investissement majeur.

C'est ainsi que Fareva collabore avec la start-up Keocyt qui développe des anticancéreux ; et la jeune entreprise Maia Woundcare, qui a inventé un pansement dynamique qui stimule les cellules responsables de la cicatrisation, sous-traite également sa production à Fareva.

 

On constate que, comme dans la plupart des industries notamment l'automobile et l'électronique, la sous-traitance des façonniers joue un rôle essentiel dans la flexibilité et la capacité d'adaptation de l'industrie pharmaceutique. Les grands groupes qui étaient jusqu'à présent très intégrés verticalement, libèrent ainsi plus de ressources pour les produits d'avenir, tout en poursuivant avec les façonniers, la fabrication des produits matures dans de bonnes conditions de compétitivité.

Le premier groupe mondial Pfizer qui a confié aux façonniers 30% de sa production, semble montrer la voie.

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17 novembre 2013 7 17 /11 /novembre /2013 17:09

Inventel 1990, Withings 2008, Sculpteo 2009, Invoxia 2010, c'est la série d'entreprises créées par Éric Carreel. Chaque fois,  associé avec un ou plusieurs partenaires – chercheur et/ou développeur d'entreprise, É. Carreel a fondé des jeunes pousses autour d'innovations et de créations de produits technologiques.

 

L'ESPCI

 

É. Carreel est issu de l'ESPCI, École Supérieure de Physique et de Chimie Industrielles de la ville de Paris, renommée pour la qualité de sa recherche, où 6 ingénieurs diplômés sur 10 effectuent un doctorat. Les 17 laboratoires de l'ESPCI, toujours situés sur la Montagne Sainte Geneviève, au coeur du Quartier Latin, à proximité de Normale Sup, sont une pépinière exceptionnelle de chercheurs avec 5 prix Nobel – Pierre et Marie Curie, Irène et Frédéric Joliot-Curie, Pierre-Gilles de Gennes et Georges Charpak. Malgré sa petite taille, l'ESPCI pointe dans les 300èmes au classement de Shanghaï, non loin de Polytechnique, et prétend être au premier rang des écoles d'ingénieurs dans le classement.

 

Depuis sa création en 1882, avec Pierre Curie à sa tête, la stratégie de l'ESPCI est de bannir toute barrière entre recherche fondamentale et recherche appliquée. Les chercheurs sont évalués sur la qualité de leurs relations avec l'industrie et fortement incités à déposer des brevets d'invention, brevets dont ils gardent la maîtrise. C'est ainsi, qu'au sein de l'école, un brevet par semaine est déposé, en faisant le numéro 1 en France parmi les écoles d'ingénieurs.

L'une des jeunes pousses créées au sein de l'école en 1902 par Georges Claude, est devenue l'Air Liquide.

 

Pour faciliter la création d'entreprises, le dépôt de brevets par ses chercheurs et attirer des chercheurs étrangers, l'école associée à la Mairie de Paris et à l’Association des ingénieurs ESPCI (AIE), a créé en décembre 2010, le Fonds de dotation Georges Charpak financé par des entreprises et des donateurs, notamment Total Petrochemicals, Schlumberger, Lundbeck et Xavier Niel.

Parmi les premiers projets financés par ce fonds, Capsum, créée par les chercheurs Sébastien Bardon et Jérôme Bibette, développe de nouveaux matériaux en "microfluidique" pour l'industrie des cosmétiques ; il y a aussi l'Aixplorer, un échographe ultrarapide qui utilise les principes du "retournement temporel", inventé par Mathias Fink, chercheur à l'école, à l'origine de la création de Supersonic Imagine.

 

L'école a su ainsi créer un écosystème favorable à l'industrialisation de la recherche et à la création d'entreprise. Et le direction de l'école n'est pas la dernière à donner l'exemple : Jacques Lewiner, directeur scientifique de 1987 à 2001 (et maintenant président du Fonds Georges Charpak), a déposé près de 1000 brevets français et étrangers et créé 5 entreprises : Finsécur, Roowin, Cynove, Cytoo et Inventel (avec É. Carreel).

 

Inventel

 

Fondée en 1990 par É. Carreel et J. Lewiner, la jeune entreprise après avoir tenté le marché des télécopieurs, s'est lancée en 1993 dans la réalisation de « pagers », terminaux de poche de radiomessagerie, qui ont eu une heure de gloire éphémère avant que les téléphones portables ne deviennent numériques et hyper compétitifs. Elle a développé ensuite des équipements sans fil pour les réseaux de téléphonie fixe, utilisant les technologies BlueTooth, DECT et Wi-Fi. Son activité a vraiment décollé au début des années 2000 avec la sortie de modems ADSL supportant le Wi-Fi dont la Livebox pour France Télécom. Après une première levée de fonds de 6 millions € en 2001 auprès de Banexi et d'Innovacom, le chiffre d'affaires a cru rapidement atteignant 45 millions € en 2004 avec 75 employés. Inventel a été rachetée par Thomson MultiMedia (devenue Technicolor) en 2005 pour 135 millions € environ, soit le chiffre d'affaires prévu pour cette année-là.

 

Withings

 

Après être resté quelque temps chez Thomson à la direction technique, É. Carreel repart à la création d'une nouvelle entreprise avec Frédéric Potter, cofondateur de Cirpack (également cédé à Thomson) et un jeune Centralien Cédric Hutchings : Withings. Le fil conducteur des produits de Withings est d'enrichir des produits du quotidien – bien-être et santé, avec une liaison Internet permettant l'offre de nouveaux services. Le contrôle des produits est aussi déporté par exemple vers un iPhone, un BlackBerry, un téléphone Android ou un iPad. Bien que bénéficiant de fonctionnalités beaucoup plus évoluées, l'aisance d'utilisation des produits reste optimale grâce à l'ergonomie des smartphones et des tablettes.

Le premier produit est une balance pèse-personne lancée en 2009 en France, en Europe et aux Etats-Unis. Au printemps 2011, il est suivi par le tensiomètre, puis fin 2011, par le Smart"Baby Monitor" permettant la surveillance à distance d'un bébé.

 

Ce développement rapide à l'international a d'abord été financé en septembre 2010 par une levée de fonds de 3 millions € avec Ventech, puis en juillet 2013, par une nouvelle levée de fonds de 23,5 millions € auprès de BPIFrance (11 millions €), IdInvest Partners, 360 Capital Partners et Ventech.

90% des ventes se situent hors de France, 45% aux Etats-Unis, 30 % en Europe hors France, 15% en Asie-Océanie.

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Withings se concentre sur la conception avec des designers et la commercialisation, la production étant largement sous-traitée. On notera qu'Apple est organisée de la même manière et que, quand le marché a changé avec la concurrence asiatique et l'émergence des smartphones, Nokia a été handicapée par ses nombreuses usines dédiés à des produits obsolescents.

Contrairement à ce que pensent certains politiques, le coeur du métier d'innovateurs comme Withings est la conception et la commercialisation de produits et non la production. Attention à ne pas investir les fonds collectés dans des outils de production dont la compétitivité serait douteuse.

On peut d'ailleurs s'inquiéter de la présence de BPIFrance au capital de Withings et des pressions qu'elle pourrait recevoir des politiques.

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14 novembre 2013 4 14 /11 /novembre /2013 21:41

Cameleon Software côtée en Bourse et classée 82ème en 2013 au palmarès Truffle des éditeurs français de logiciels, vient d'accepter une offre publique d'achat de l'éditeur texan PROS qui est huit fois plus gros – ventes de 130 millions $ pour 13 millions € à Cameleon. Le prix offert de 2,05 € est 45% supérieur à la moyenne récente des cours. Les dirigeants et les deux fonds d'investissements IRDI et Sopromec soit 26% du capital, vont apporter toutes leurs parts !

 

PROS est un spécialiste des logiciels d'analyse des flux massifs de données (« big data ») en vue d'optimiser les ventes. Il a notamment développé les algorithmes de « yield management » utilisés par les compagnies aériennes, les chaînes d'hôtels, les loueurs de voitures, etc. pour moduler les prix de vente en fonction de la demande et du remplissage des capacités disponibles. Cameleon développe depuis 1987 des solutions de CPQ – automatisation de la configuration des produits et des devis. Depuis deux ans, le marché évolue rapidement, avec des offres en mode SaaS. Le leader américain Big Machines vient d'être racheté par Oracle, un autre concurrent Apptus vient de lever 37 millions $ et des jeunes pousses comme Glider lancent des offres de service légères et compétitives.

 

En annonçant leur accord, les dirigeants de PROS et de Caméleon expliquent qu'ils pourront ensemble proposer une offre combinée d'optimisation des prix (grâce à l'analyse des big data) de configuration des offres et de présentation de devis – le savoir-faire de Cameleon. Dans un marché en pleine évolution avec l'intervention de poids lourds comme Oracle, on peut comprendre et apprécier que ces deux acteurs de petite taille relative réunissent leurs forces.

 

L'autre facette du projet est l'anticipation d'une croissance plus rapide de Cameleon sur le marché nord-américain qui constitue actuellement 35% de ses ventes. En parallèle, PROS espère se développer en Europe à partir de sa nouvelle filiale toulousaine.

 

Créé en 1987, Cameleon et PROS qui existe depuis 1986 sont presque jumeaux ; dans l'univers bouillonnant du logiciel, ils ont progressivement développé leur activité autour de spécialités de niche, où leur savoir-faire est reconnu. Mais dans un monde où des mastodontes comme SAP, Microsoft, Oracle s'intéressent de plus en plus au processus de vente, et se mesurent à une étoile des logiciels de vente et quasi-inventeur du SaaS, qui a pour nom Salesforce.com, on peut se demander si cette union n'est pas tardive. Les dirigeants et actionnaires de Cameleon, font eux certainement un bonne affaire en cédant leurs parts avec une prime élevée, et le fondateur Jacques Soumeillan, officiellement restant avec la direction de PROS, a sûrement envie, depuis près de 30 ans à la tête de Cameleon, de partir vers d'autres projets ou horizons.

 

Ce qu'on peut souhaiter, c'est que les autres sociétés de logiciel au palmarès de Truffle trouvent la formule magique pour grandir plus vite, prendre rapidement des positions solides sur les principaux marchés existants pour se focaliser ensuite sur les marchés émergents comme les BRICS. On pensera bien sûr à la belle histoire de Criteo qui en 6 ans est déjà 50 fois plus gros que Cameleon vieux de 26 ans.

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21 octobre 2013 1 21 /10 /octobre /2013 22:27

Le 17 octobre 2013, la prise de contrôle du canadien Humanware par Essilor, leader mondial des verres ophtalmiques, est annoncée. Humanware, une PME québecoise issue de la fusion en 2005 entre VisuAide créée en 1988 et PDI, avec un chiffre d'affaires de 35 millions $, est un des constructeurs majeurs d'aides techniques pour les malvoyants et les non-voyants. Elle distribue ses produits en Amérique du Nord, Europe, Moyen Orient, Asie et Australie.

 

Cette intervention d'Essilor va considérablement perturber un marché de niche où une dizaine d'acteurs internationaux se partage un potentiel d'environ 140 millions de personnes déficientes visuelles, dont seulement 5% possède des équipements adaptés, ceux-ci leur étant souvent inaccessibles financièrement. Selon Essilor, compte tenu notamment du vieillissement de la population, 400 millions de personnes souffriront de déficience visuelle en 2050.

 

Il s'agt là d'une incursion d'Essilor sur une nouveau segment, alors que jusqu'à maintenant, les ventes étaient réparties à 90% : verres opthalmiques, 10% : équipement pour le opticiens. Le défi sera sans doute de savoir développer les ventes via le réseau commercial d'Essilor qui n'est pas formé sur les équipements pour déficients visuels.

 

Essilor va cependant apporter une réseau mondial de relations privilégiées avec les opticiens, les chaînes, les centrales d'achat et les indépendants, qui sont déjà les principaux revendeurs d'aides techniques pour les malvoyants. Aucun doute que ces relations vont permettre à Humanware de prendre des marchés à ses principaux concurrents comme Freedom Scientific (USA, leader mondial actuel), Optelec (Pays-Bas), Hims (Corée du Sud). Sur le marché français, son marché domestique, le soutien d'Essilor va certainement renforcer la présence d'Humanware.

 

Les capacités d'innovation et de R&D d'Essilor vont permettre à Humanware de sortir des produits avancés et performants. Nous en avons déjà un témoin avec le Prodigi, un nouvel assistant de vision numérique, qui vient d'être lancé et dont l'assistant d'installation a été développé avec la collaboration d'Essilor.

 

 

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