Depuis 2003, une équipe de chercheurs du centre de Mannheim de Bombardier développe un système sans contact de transmission d'énergie électrique pour les véhicules, appelé Primove. Bombardier est un constructeur canadien de trains, de trams et d'avions, dont la division Transport dirigée par un Centralien, André Navarri, est basée à Berlin avec de nombreux sites de production en Europe, notamment à Crespin près de Valenciennes.
Le principe de ce système est simple et bien connu depuis le 19è siècle : l'énergie électrique passe de bobines de courant émettrices logées dans le sol à des bobines réceptrices à bord des véhicules par l'effet d'un champ magnétique intense. Ce phénomène d'induction est déjà utilisé pour les tables de cuisson et pour recharger les brosses à dents électriques en toute sécurité dans l'environnement humide des salles de bains.
Mais son application pour alimenter des véhicules pose quelques difficultés : contenir les ondes électromagnétiques pour éviter les perturbations du voisinage et les éventuelles réactions du corps humain, assurer un positionnement optimal entre les bobines et faire en sorte que les couches de matériaux (béton, asphalte, etc...) ne fassent pas écran à la transmission.
Afin de simplifier l'infrastructure d'alimentation et de réduire les coûts, Bombardier a complété le système par la technologie MITRAC Supercaps qui est un accumulateur d'énergie électrique réalisé avec des condensateurs à double couche haute performance et installé sur le toit des tramways. Avec cette technologie, les bobines émettrices sont placées de manière discontinue le long du parcours du tramway, par exemple aux arrêts et en bas des côtes, le tramway parcourant l'essentiel de sa route, alimenté par les accumulateurs. Cela permet aussi d'emmagasiner l'énergie lors des freinages et conduit à une réduction d'environ 30% des consommations.
En 2010, un premier test a été lancé sur une ligne de tramway de 600 m sur le site de la foire d'Augsbourg avec le soutien du ministère allemand des transports. Le tramway doté de deux bobines réceptrices capte le courant provenant de segments de câbles enfouis entre les rails. Ce test a été parait-il, un plein succès démontrant un conformité totale avec tous les codes en matière de compatibilité électromagnétique.
Plus récemment, des essais ont été réalisés avec des prototypes automobiles notamment dans le cadre du projet « Flanders Drive » de recharge par induction d'un bus avec un segment de 125 m sur la chaussée de la ville de Lommel en Flandre. Et à partir de juin 2012, une partie du réseau de bus de la ville de Braunschweig va être équipée de bus électriques fonctionnant avec la technologie de Bombardier.
Clairement, Bombardier progresse en Allemagne avec l'appui des autorités pour valider sa technologie. Elle ambitionne de l'appliquer à tous les types de véhicules qui circulent en ville : bus, taxis, camions de livraison, voitures particulières. Ce serait la fin des caténaires le long des lignes de tramway, et pour les véhicules électriques, la fin des bornes et des câbles inesthétiques et sensibles au vandalisme. Imaginons par exemple Autolib sans câble ni borne : il suffirait que la voiture s'arrête quelques secondes sur un parking dédié pour recharger sans contact ses accumulateurs et être prête à repartir. Mais Bolloré, le constructeur des voitures Autolib, n'est sûrement pas intéressé, ayant beaucoup investi dans la mise au point et la production des batteries au lithium.
Cela n'est pas tout à exact : Renault travaille avec Schneider Electric sur un projet similaire : le projet CINELI (Charge Inductive Electrique Interopérable), financé par le pôle de compétitivité Mov’éo. Renault participe aussi au projet européen WIC2IT (Wireless inductive charging to interoperation testing) financé par l'ANR (Agence Nationale de la Recherche) où on retrouve Daimler, Bosch et Halo IPT. Mais ces projets semblent encore très loin des tests opérationnels et par ailleurs, Renault et Nissan se sont engagées depuis longtemps sur la voie des batteries au lithium. L'engagement de Bombardier paraît bien plus convaincant.
Du point de vue du développement durable, la voie de l'alimentation par induction associée à un système d'accumulateurs capacitifs est particulièrement convaincante. On sait que le lithium des batteries est une ressource rare et coûteuse, que de toutes façons leur autonomie sera toujours limitée. Ce n'est pas le cas des matériaux utilisés par Bombardier. Un des côtés les plus attractifs de la technologie, est l'invisibilité des stations de charge, entièrement noyées sous la chaussée. Souhaitons que le ministère des transports français se concerte avec son voisin allemand et lance rapidement des opérations de test et de fonctionnement opérationnel !